le zap de zep

le zap de zep

zep, la bd dans la pô

C’est à l’âge de 25 ans que Zep a accouché d’un gamin à la houppette blonde.
 «C’est pô juste», «tchô monde cruel»… Les soupirs de Titeuf, depuis Genève, ont fait le tour du monde. Sur le marché de la bd, c’est sûr, le petit cancre est premier de la classe. Au papa de passer l’oral !

Activmag : Que faisiez-vous à 25 ans ?
Zep :
Comme aujourd’hui, de la BD. La différence, c’est que j’attendais que ça démarre. J’avais déjà réalisé trois ou quatre livres qui n’avaient pas eu de succès, mais je continuais à proposer de nouveaux projets à des éditeurs.

Racontez-nous votre premier contact avec Jean-Claude Camano, votre «découvreur»…
C’est lui qui m’a appelé. A l’époque, il travaillait aux Editions Glénat, l’un des rares éditeurs à qui je n’avais pas envoyé de dossier. Son appel était tellement improbable que j’ai cru à la blague d’un copain et j’ai raccroché. Dans les secondes qui ont suivi, je suis resté pétrifié devant mon téléphone. Et si ça n’était pas une farce ? Heureusement, il m’a rappelé aussitôt…

Et après ?
Je suis allé à Paris pour le rencontrer, mais sans me bercer d’illusions. Je pensais que l’entretien se finirait comme d’habitude : “On est très intéressé par ce que vous faites mais… Car il y avait toujours un «mais» et ça n’aboutissait pas. Je m’attendais donc à ce que Jean-Claude Camano en arrive à la même conclusion. Or, il s’est montré très enthousiaste sur le projet de Titeuf. Le premier album est paru un mois après mes 25 ans. Avec le succès, j’ai été happé par une spirale professionnelle et créative plus active que les 25 années qui avaient précédé.

Comment vous voyez-vous dans 25 ans ?
J’aurai 74 ans et je dessinerai toujours car je n’ai pas envie de m’arrêter. Si un jour je ne pouvais plus dessiner et inventer des histoires, ma vie deviendrait très triste. J’espère faire des livres jusqu’à mon dernier souffle.

Titeuf aura-t-il 25 ans un jour ?
C’est possible. Titeuf est mon lien à l’enfance et ce lien finira peut-être par se rompre. A ce moment-là, je pourrais l’emmener ailleurs. Mais à 25 ans, on a moins de temps pour la curiosité parce qu’on est en train de construire sa vie, de se mettre en couple, de se chercher un boulot, un appartement… En même temps, vues par Titeuf, ces choses-là peuvent être marrantes. C’est un personnage qui a besoin de mettre de la conquête de l’espace dans son quotidien. Alors pourquoi pas ?

Faire la promo de vos albums, c’est un plaisir ou une contrainte ?
J’aime bien, mais sur un temps donné. Quand on fait un livre, on ne réfléchit pas aux causes qui nous font raconter ces histoires : tout se crée instinctivement. Face aux questions de la presse et de mes lecteurs, je trouve des réponses, je comprends les clefs de ce que j’ai réalisé et je mets des mots dessus. C’est intéressant car cela permet de boucler l’album et de passer plus facilement au suivant.

UN BÉDÉMANE BANKABLE

Philippe Chappuis pousse son premier cri le 15 décembre 1967 à Genève. Dès qu’il apprend à lire, le bambin dévore toutes les bandes dessinées qui lui passent sous le nez. L’élève est bon en français et en dessin, mais pas fortiche en gym : “C’est une constante”, sourit-il. Lui, préfère user ses crayons de couleurs que ses baskets. A l’orée de l’adolescence, ce raide-dingue de  Led Zeppelin crée un fanzine intitulé Zep. Ce surnom ne le quittera jamais.
A 14 ans, fini l’école, en avant les Arts déco, d’où il sortira diplômé quelques années plus tard. Allez savoir pourquoi, il se met à dessiner ses souvenirs d’enfance sur un carnet de croquis : Titeuf est né. La tournée des éditeurs commence, mais c’est Glénat qui saura déceler le potentiel du blondinet. L’album cartonne. Dès lors, Zep transforme en or tout ce qu’il crayonne.

TITEUF LE BLOCKBUSTER

En 2001, toutes les questions que posent les 9-13 ans sur l’amour et le sexe sont traitées dans son livre «Le Guide du zizi sexuel». Résultat : 2 millions d’exemplaires vendus! Deux ans plus tard, Zep reçoit le Grand Prix d’Angoulême pour l’ensemble de son œuvre. Peu à peu, le dessinateur élargit sa palette en s’adressant à un public adulte. Avec «Happy Sex», il aborde les relations de couple avec humour : plus de 400 000 albums écoulés et une série de Happy Books lancée. Cette année, l’auteur a publié Un bruit étrange et beau et le tome 2 de «What a wonderful world». Des créations pour grands qui l’éloignent un temps de Titeuf. Véritable blockbuster, le mouflet se hisse en pole position des ventes de BD à chacun de ses retours. Traduits en 25 langues, ses albums affichent aujourd’hui au compteur plus de 20 millions d’exemplaires vendus à travers le monde.

LA VIE NE FAIT PAS LE MOINE

«Un bruit étrange et beau» est paru cet automne. L’histoire ? La quête existentielle d’un Chartreux qui, après avoir fait vœu de silence pendant 25 ans, se retrouve confronté à la frénésie de Paris. L’occasion de causer «retraite» avec Zep.

Dans un cloître, qu’est-ce qui vous manquerait le plus ?
Les femmes et la mienne en particulier, son contact. Je ne supporterai pas une société composée uniquement d’hommes. A part ça, je m’accommoderais assez bien de la solitude.

Vous êtes-vous déjà retiré dans un monastère ?
Oui, j’ai fait des retraites dans le silence quand j’avais une vingtaine d’années. A l’époque, je sortais beaucoup et je ressentais parfois le besoin de faire une coupure, de vivre quelques jours sans prononcer une parole. C’était un moyen de faire le point, de trouver un axe à ma vie.

Tenté par la vie monastique ?
C’est un choix assez fascinant. Coupé du monde, sans contact avec l’extérieur ni avec l’information : je peux comprendre l’envie d’échapper à cette société-là. Je le vois aussi comme un espace de liberté : le rythme de vie des moines est tellement réglé qu’ils ne se soucient pas des aspects pratique et logistique du quotidien. Ils se concentrent sur des pratiques spirituelles et philosophiques et nous, sur des questions plus triviales : préparer à manger, aller chercher les enfants à l’école, payer les factures… Des impératifs qui nous laissent peu de temps à consacrer à des choses plus profondes.

+ d’infos : Un bruit étrange et beau. Ed. Rue de Sèvres

ZEP AU PAYS DE MERVEILLES

Le deuxième opus de «What a wonderful world» vient de sortir. L’album reprend les meilleurs dessins du blog sur lequel Zep crayonne l’actualité sociopolitique avec un humour grinçant. What a wonderful world, une formule bien optimiste au regard du contexte actuel… Le dessinateur l’assure : “Il n’y a pas d’ironie dans le choix de ce titre, c’est une vraie déclaration d’amour au monde. Je suis émerveillé par la nature humaine. Les informations tendent à en montrer ses pires aspects – et ils existent – mais le monde n’est pas constitué de gens gentils d’un côté et de gens méchants de l’autre. Je crois que toutes ces facettes sont en nous et qu’on en développe plus ou moins certaines. Mais je ne désespère pas qu’on finisse par devenir des gens fréquentables avec le temps.”

PAS DE PROVOC’

Car, dans son monde merveilleux, Zep ne peut ignorer les actes terroristes. Retient-il sa plume sur certains sujets ? “Non. Au contraire, plus le sujet est sensible plus ça me donne envie de m’y atteler et de trouver le bon angle pour l’aborder. Mais je ne suis pas un dessinateur de la provocation, je veux bien être impertinent, mais pas agresser les gens. Depuis l’attentat de Charlie Hebdo, on se pose des questions dans le dessin qu’on ne se posait pas avant.”

+ d’infos :
What a wonderful world, tome 2.
Editions Delcourt

LE ZAP DE ZEP

Un défaut ?
La gourmandise, mais elle est liée à ma personnalité. Et puis, je ne me vois pas devenir raisonnable à mon âge.

Votre péché mignon ?
Le chocolat

Sportif ?
Pas trop, juste assez pour me donner bonne conscience.

Un personnage que vous auriez aimé inventer ?
Titeuf, mais je l’ai déjà fait. Peut-être Mickey parce que c’est une icône.

Votre dernier coup de gueule ?
Dans le TGV. Il y avait du monde autour de moi, mais j’ai quand même insulté copieusement mon ordinateur qui m’a planté avec dix pages de scénario que je venais d’écrire.

Le dernier cadeau que vous ayez reçu ?
Une bouteille de Chartreuse verte.

Le don que vous aimeriez avoir ?
L’ubiquité. Ça me permettrait d’être à Genève et Paris en même temps. Mais bon, tant qu’on n’a pas inventé la téléportation…

Vous remontez le temps. Vous allez «quand»?
Au début des années 60, à Greenwich Village pour assister à l’avènement du mouvement folk qui va précéder la pop culture.

Quelle autre profession auriez-vous pu exercer ?
Musicien. Depuis toujours, je joue de la guitare dans des groupes. Mais mes amis me disent que j’ai bien fait de choisir dessinateur !

Une réussite ?
La confiture aux cerises de mon jardin. J’en suis assez fier.

Pas marre qu’on vous parle tout le temps de Titeuf ?
Si on ne m’en parlait plus, je m’inquièterais.

© Portraits : Alain Grosclaude, dessins : Zep

miossec, un drôle de mammifère

miossec, un drôle de mammifère

la fureur de vivre

Ça ne saute pas aux yeux, mais Miossec est un optimiste. Et le poète écorché construit l’urgence de vivre sur des fissures. De passage à Annecy en novembre, il se déleste de ses maux avant de reprendre la route.

Son ami Gustave Kervern dit de lui qu’il est “rocailleux, broussailleux. Verdoyant comme une île de Bretagne”. La définition plaît bien à Miossec. Le côté verdoyant, surtout. Pour «Mammifères», son 10ème et dernier album en date, le Breton abandonne son rock écorché. L’écriture est limpide, lumineuse, les coups du sort tombent sous les assauts d’une rage de vivre festive. Les attentats du 13 novembre et la mort de son ami Rémi Kolpa Kopoul ont secoué son long squelette, il a pris chaire. Et quand la musique lui ouvre le ventre, il s’en échappe 20 ans d’amarres larguées, de crevasses, d’émotions simples et brutes. Il est timide, Miossec. Généreux, attachant. Le cinquantenaire parle en silences, son rire bute souvent sur des points de suspension.

J’avais besoin de proximité, de chaleur, d’humanité, de retrouver ce côté un peu couillon du troubadour.

Activmag : Vous avez dit que pour vous, l’interview était une purge. Vous n’aimez pas parler de vous ?
Miossec
: Ah non, non ! Bien au contraire ! «Purge» c’est dans le sens où on peut se purger… Quand on a fait un disque, ou réaliser quelque chose, c’est sympa d’avoir à faire à des gens dont le métier est de vous écouter. On peut se délester.

«Mammifères», votre 10ème album, que vous venez de présenter à Bonlieu Scène Nationale ce soir, est plus folk que les précédents, plus organique. Où est-ce que vous vous situez, aujourd’hui, dans le paysage musical français ?
Je ne me situe pas, en fait. J’ai plutôt l’impression que chaque chanteur est une petite boutique, que nous sommes de petits épiciers…

Cet album donne l’impression d’un sentiment d’urgence de vivre. Avec «la vie vole», vous faites notamment référence aux attentats du 13 novembre. Qu’ont-ils changé en vous, ces attentats ?
En tant que chanteur, j’ai eu l’impression que la réponse à tout ça était d’aller faire des concerts quelque part un peu militants et d’aller jouer partout. Comme une forme de thérapie, une façon de prouver l’utilité du chanteur… Ne serait-ce qu’à travers le sourire des gens après un concert. Ça fait un bien fou !

C’est la raison pour laquelle vous jouez aussi dans des endroits inattendus ? Un ancien bordel, une cours d’école ou le jardin d’une cathédrale ?
Oui… être en contact direct, sans barrières qui vous isolent. J’avais besoin de proximité, de chaleur, d’humanité, de retrouver ce côté un peu couillon du troubadour. Et nous avons joué dans des endroits où, d’ordinaire, il ne se passe pas grand-chose. Un public tout près, un accueil vraiment chouette…

Vous dites aussi de la mort qu’ «elle n’est pas si triste que ça». Vous pensiez au décès de votre ami, Rémi Kolpa Kopoul, à qui vous dédiez «Mammifères» ?
Oui. Et quand ce sont des amis qui décèdent et qu’ils ont eu une vie extraordinaire, ça ne rend pas forcément triste. C’est un mélange de tristesse et d’apaisement, c’est mieux que de nourrir le manque. Rémi a vraiment eu une belle vie !

Vous semblez plus apaisé. Votre haine du notable et votre désir de saccage ont-ils disparu ?
Non, ces sentiments sont toujours en moi. Mais par les temps qui courent, ça n’est pas prioritaire, les évènements récents les ont submergés. Ils nous ont changés. Nous ne sommes pas les mêmes qu’il y a 5 ans. Et puis, vous savez, cette vie de tournées, c’est plutôt quelque chose qui vous donne beaucoup d’occasions de rire… Une sorte de bulle. Humainement, c’est assez confortable.

La découverte de votre maladie a dû changer pas mal de choses…(atteint d’ataxie, une pathologie neuromusculaire, le chanteur ne boit plus une goutte d’alcool depuis 6 ans.)
Oh non, pas vraiment. Le médecin m’a expliqué ce dont je souffrais. Il m’a dit que je risquais la chaise roulante si je n’arrêtais pas de boire. Alors j’ai arrêté. Je n’ai pas eu peur, c’était juste un changement de programme, une autre vie. Et je l’aime, cette nouvelle vie ! J’aimais bien celle d’avant aussi, d’ailleurs. C’est plutôt drôle d’avoir les 2 !

Et votre vie dans 10 ans, vous l’imaginez comment?
Ah, je ne m’imagine pas ! En musique, l’improvisation est ce qu’il y a de mieux et dans la vie aussi. Mon métier me permet de vivre comme ça, de laisser aller les surprises. Autant en profiter ! Ce qu’il y a de bizarre, c’est que je suis un indécrottable optimiste… Si je n’avais pas fait de la musique, j’aurais probablement aimé être boulanger. C’est beau de faire du pain, tout le monde mange du pain. J’aurais été utile à quelque chose.

+ d’infos : www.christophemiossec.com

MIOSSEC SANS MUSIQUE

A quoi rêviez-vous à l’âge de 25 ans ?
…A tout, sauf être chanteur ! Ça n’était absolument pas au programme, je me voyais plutôt écrire un bouquin.

Que regrettez-vous de cette période ?
Je ne suis pas du genre à regretter, c’est assez atroce d’ailleurs…

Que diriez-vous aujourd’hui à votre moi de 25 ans ?
Ah, les conseils… Ça peut être quelque chose d’abominable, les conseils… Franchement, je n’aurais pas grand-chose à lui dire. Il faut en chier un peu par moment, c’est nécessaire, ça permet de connaîitre la société dans laquelle on évolue. J’ai fait plein de boulots différents et c’est plutôt bien. Côtoyer les autres, travailler avec les autres m’a construit, même dans les moments insupportables.

Si vous étiez un personnage de fiction ?
Je serais Petit Scarabée dans «Kung Fu», le héros d’une vieille série.

Et un personnage historique ?
(Il éclate de rire) Emmanuel Macron ! Parce que les dégâts qu’il va faire sont déjà historiques ! Non, je rigole… En fait, il y a toujours ce fantasme de la résistance… J’espère être du côté de ceux qui étaient résistants, pas du côté des miliciens… (Il rit encore) On ne sait jamais ce que la vie vous réserve !

Votre livre de chevet ?
Celui de François Hollande. C’est un livre vraiment drôle, on rigole tout le temps. C’est étonnant, la légèreté avec laquelle il a fait ça, une sorte de confiance absolue envers 2 journalistes qui, au final, ne l’ont pas ménagé. Qu’il leur balance des trucs de politique étrangère, comme ça, c’est vraiment hallucinant, les bras vous en tombent !

Quelle qualité aimeriez-vous avoir ?
En vieillissant naît une espérance d’être mieux, de s’améliorer, l’espérance d’avoir fait suffisamment de conneries pour s’ajuster, de reconnaitre ses défauts pour les atténuer.

Faites un vœu !
Ah, la paix dans le monde ! Sans rigoler ! Utopique ? Mais bon…

© Yann Orhan

dessert – feuilleté

dessert – feuilleté

pétales de pommes en feuilleté

POUR 6 PERSONNES
PRÉPARATION : 20 MIN
CUISSON : 30 MIN

3 belles pommes I 50 g de sucre I 1 citron I 1 pâte feuilletée I Sucre glace I 2 à 3 c. à s. de confiture de mûre ou de myrtille

Préchauffer le four à 180°C (th.6). Laver les pommes et ôter le trognon au vide-pomme. Les trancher très finement. Dansunecasserole,fairebouillir40cld’eau aveclesucreetlejusducitron. Plonger délicatement les tranches de pommes dans le sirop bouillant pendant environ 3 min pour qu’elles soient plus tendres.

Egoutter les pommes et les laisser refroidir pendant quelques minutes. Sortir la pâte feuilletée du réfrigérateur et la couper en 6 bandes (possibilité de réaliser 8 bandes pour des feuilletés plus petits).
Sur la pâte feuilletée, étaler un peu de confiture et placer les lamelles de pommes les unes à côté des autres en les superposant légèrement, tout en laissant dépasser environ 1cm de pomme au-dessus.
Rabattre la pâte feuilletée sur les lamelles de pommes et rouler les pommes sur elles-mêmes de manière à former une rose.
Placer les «roses» sur un papier sulfurisé ou dans des moules à muffin légèrement graissés et appuyer délicatement pour que la rose tienne bien en place. Répéter l’opération pour les autres roses feuilletées.
Enfourner pendant environ 30 à 40 min. Sortir les roses feuilletées aux pommes du four et saupoudrer légèrement de sucre glace juste avant de servir. Déguster les pétales de pommes en feuilleté tièdes ou froides.

© UE/Interfel/Amélie Roche

andré dussollier, la vérité ou presque

andré dussollier, la vérité ou presque

andré des artistes

Mon petit doigt m’a dit qu’on l’avait vu sur le Pâquier… La vérité ou presque, c’est qu’une belle fille comme moi n’a pu résister à l’envie de sonder « un cœur en hiver ». Pas besoin de sortir le grand jeu ni de sombrer dans le mélo pour le rencontrer. Mais chut !! Ne le dis à personne…

Considéré longtemps comme un acteur intellectuel, André Dussollier se fait connaître du grand public avec Trois hommes et un couffin, un succès populaire qui va lui permettre de varier les registres et de donner enfin à voir toute la palette de son immense talent. Depuis, l’Annécien n’a cessé de nous surprendre, nous émouvoir, nous amuser, nous effrayer, nous séduire… André Dussollier traverse le temps avec une incroyable légèreté, variant les rôles et les réalisateurs au gré de ses coups de cœur, enchaînant cinéma, théâtre, lecture avec toujours un même bonheur… pour lui comme pour nous !

Blessé au pied, le 28 septembre dernier en pleine représentation de Novecento (le spectacle qu’il a entièrement imaginé et mis en scène à partir de l’œuvre d’Alessandro Baricco, qui lui a valu un Molière), c’est à la veille de son opération qu’André Dussollier a eu la grande gentillesse de répondre à nos questions.

Activmag : quel petit garçon étiez-vous ?
André Dussollier :
J’ai passé mon enfance à Cruseilles, fils unique de parents fonctionnaires. Vous imaginez bien que dans un village de 1000 habitants, à l’époque, les distractions étaient rares… J’étais un petit garçon sage, désireux de faire plaisir aux adultes. Je voyais assez régulièrement mes cousins grenoblois, mais c’est surtout par le sport que j’ai pu véritablement me faire une vie sociale. Au foot, j’avais enfin des copains, je partageais les bons et les mauvais moments. Chaque déplacement était une grande aventure, que nous préparions fiévreusement tout le samedi…

Quel adolescent ?
Sur les conseils d’amis, mes parents m’avaient inscrit en sixième dans un collège réputé de Saint-Julien, où je suis arrivé en cours de trimestre. J’y étais interne externé – un terme qui n’existe plus – car c’était à l’origine un établissement réservé aux filles, et l’internat n’était pas mixte. Je logeais donc chez ces amis, en compagnie d’autres jeunes dans la même situation. C’était très dur, en classe nous étions 4 garçons pour 25 filles, vraiment dur… et je devais, en outre, mettre les bouchées doubles pour rattraper mon retard.

Première rencontre avec le théâtre ?
Un jour, notre professeure de français nous a emmenés voir Poil de Carotte au théâtre. C’était incroyable, des gens riaient et applaudissaient à des choses dont on ne riait pas chez moi. J’ai découvert un autre monde, plus vivant, plus libre, et j’ai su que je voulais en faire partie… J’ai aussitôt intégré la petite troupe du collège.

Il vous a pourtant fallu attendre un peu ?…
J’avais bien tenté quelques approches dans ce sens, et je m’étais déjà bien renseigné, mais en province – et a fortiori chez moi -les réticences étaient vives. C’était un milieu totalement inconnu, un peu inquiétant même. Personne de notre entourage ne fréquentait, ni même ne connaissait de comédiens… J’ai donc rassuré mes parents en terminant ma scolarité et en faisant des études de lettres. Une fois mes diplômes en poche (deux licences et une maîtrise, mazette !), je suis parti tenter ma chance à Paris.

Comment vous y êtes-vous pris ?
Très candidement… en allant frapper à la porte du Conservatoire. J’ai dû demander une dérogation pour passer l’examen l’année suivante car j’avais dépassé l’âge limite. J’ai toujours été en retard pour tout… Là encore, j’ai travaillé d’arrache-pied dans le cours de Jean Périmony, et j’ai obtenu un premier prix, et mon droit d’entrée à la Comédie Française.

…Que vous avez quittée au bout d’un an ?
Il y avait une grève à la Comédie à ce moment-là. Ce n’était pas de chance, parce que j’avais des rôles. Truffaut m’avait contacté pour «Une belle fille comme moi», et je n’ai pas voulu laisser passer ma chance, alors je suis parti.

Resnais-Dussollier, l’amour à mort ?

C’est vrai que j’ai beaucoup tourné dans les films de la Nouvelle Vague, ce qui explique sans doute que je sois longtemps resté un acteur un peu confidentiel. Dont bien sûr ceux d’Alain, qui m’a sans doute offert dans «Mélo» l’un de mes rôles les plus riches. Alors, quand Coline Serreau m’a contacté – par défaut… – j’ai pu enfin tourner un film grand public.

Comment avez-vous géré la notoriété ?
Je n’ai jamais pris de coup de soleil, si c’est votre question… J’ai toujours été très conscient que ce métier n’est qu’une succession de montagnes russes. Mais le succès de «Trois hommes et un couffin» m’a fait du bien, car il m’a ouvert des horizons plus larges. Il m’a permis de casser mon image d’acteur de cinéma d’auteur, j’ai eu plus de propositions, j’ai pu varier les registres. Non, la notoriété n’a jamais été pesante.

Avez-vous de vrais amis dans le milieu artistique ?
Oui, bien sûr, j’y ai quelques amis. Mais nous menons des vies de saltimbanques, nous partons souvent… Mes ancrages amicaux sont plutôt à chercher hors du monde médiatique, ils sont les points stables d’une vie très papillonnante…

Un de vos endroits préférés à Annecy ?
Un banc, sur le Pâquier, dans le tournant. Là, je suis un spectateur privilégié. En face, quatorze plans de montagne différents, à droite, le Pont des Amours qui enjambe le canal, et le lac aux couleurs toujours changeantes… J’aime bien aussi quelquefois me perdre dans les rues de la vieille ville.

Un beau souvenir d’Annecy ?
L’année où j’ai redoublé ma philo à Berthollet, j’ai eu la chance inouïe de rencontrer François Chirpaz, un prof de philo incroyable. Son enseignement a très largement et durablement marqué ma vie…

SANS VOULOIR… CHINOISER

Si vous étiez… un animal ?
Aujourd’hui un guépard pour retrouver la souplesse de ma cheville blessée lors d’une représentation de «Novecento» le 28 septembre dernier.

Un objet ?
Une clé.

Un dessert ?
Une salade de fruits régionaux, fraises des bois, jostas, mûres.

Une ville ?
Annecy, définitivement !

Un grand homme ?
Louis Armand né à Cruseilles, à qui l’on doit la rénovation et le développement du réseau ferroviaire.

Une grande femme ?
Simone Veil.

Un vêtement ?
Un «jean», pratique en toute saison et n’importe quel jour de la semaine.

Un bonbon ?
L’arlequin.

Une odeur ?
L’odeur de la forêt.

Un mot?
Rêve.

Une fête ?
Noël.

Un proverbe ?
Il faut suivre sa pente, pourvu que ce soit en montant.

PETITS +…

Votre + grande qualité ?
Je m’accroche autant que possible.

Votre + grand défaut ?
Je peux décrocher facilement…

Quelle est pour vous la vertu la + surévaluée ?
La bonne conscience.

Votre + grand regret ?
Que la vie soit trop courte.

Votre + grande peur ?
D’être encore envahi par la peur.

De quoi êtes-vous le + fier ?
D’être fidèle.

Le + beau compliment que l’on vous a fait ?
Top secret.

Le + gros reproche ?
Que je suis trop sauvage.

Votre + grand moment de solitude ?
Avant d’entrer en scène, mais j’aime ça !

Votre + grand coup de folie ?
Sauter du col de la Forclaz en parapente, mais je n’ai pas encore osé…

Ce que vous aimez le + faire ?
Me réveiller !

TOUTE DERNIÈRE FOIS

Dernier coup de gueule ?
Contre moi

Dernière fois où vous avez trop bu ?
Quand j’avais 25 ans…

Dernier cadeau que vous avez fait ?
Un bouquet de fleurs

Dernier fou rire ?
Entre amis

Dernières larmes ?
Seul, je suis pudique.

Dernier mensonge ?
Il y a 5 minutes, en répondant à une de vos questions…

©Nicolas Guerin /Contour By Getty Images / Getty Images, © Patrick-Swirc, ©AD conservatoire, ©CG14

Pin It on Pinterest