Edouard Hue

21 Juin 2021

Esprit de corps

Danser pour sortir de sa condition d’humain, rendre les corps explosifs, élastiques, presque surnaturels, voilà ce qui titille Edouard Hue, artiste annécien, sensible et spontané, qui, de rencontres en rencontres, chorégraphie ses envies et trace son chemin.

On dirait qu’on serait à la terrasse d’un café, qu’il ferait beau, qu’on aurait commandé deux expressos et un verre d’eau… A l’époque où nous rencontrons Edouard Hue, les bistrots n’ont pas encore repris vie, alors on fait semblant, on « joue à », autour d’une petite table posée sur la scène de l’Auditorium de Seynod. Un endroit dont le gracile trentenaire connaît tous nippons. Edouard connaît les visages et les moindres recoins, puisqu’il y est en résidence artistique depuis bientôt cinq ans. C’est également ici, en mars 2022, que sera joué Yumé, son premier spectacle jeune public, inspiré des films d’animation du studio Ghibli (Mon Voisin Totoro, Princesse Mononoké…) et de contes nippons. Edouard connaît très bien le Japon, contrée de son épouse, les mangas sont sa passion et la danse son équilibre, son espace de création.

A CORPS OUVERT

Une grande liberté !” voilà ce qu’il a ressenti le jour où il a fait ses premiers pas en chaussons, ou plutôt sans, d’ailleurs, car il n’est bien que pieds nus. Il a 16 ans et son sport de prédilection, c’est le basket, une porte d’entrée sur la culture américaine, surtout sur le hip-hop et ses troupes de danse, qui, à l’image des mythiques Jabbawockeez, sont régulièrement invités pour faire le show pendant la mi-temps des matchs de la NBA. Une chance, le Conservatoire d’Annecy est à une foulée de chez lui…
Quand il entre dans le studio de Lyli Gauthier, il ne sait pas vraiment à quoi s’attendre, mais prend rapidement conscience des possibilités : “C’était des sensations illimitées ! Ce qui a été dur, c’est d’utiliser toute l’envergure de mon corps. Comme j’étais ado, j’étais plutôt tourné sur moi-même, et là, il fallait s’ouvrir, se retrouver en position de vulnérabilité, faire des mouvements que tu ne fais jamais dans la vie. Mais cette ouverture de corps m’a fait évoluer aussi dans la tête.” Dès la 2e classe, il sait qu’il veut en faire son métier.

COUP DE BALLET

Une fois son talent révélé, il goûte au classique, puis au contemporain. “Tu peux être inventif dans le hip-hop, mais il y a un vocabulaire, des codes très précis, je trouvais ça trop cadré, alors qu’avec la danse contemporaine, tu peux faire ce que tu veux, mélanger, créer quelque chose de nouveau, c’est une autre dimension.” A laquelle l’initie Robert Seyfried, chorégraphe à l’origine, avec Jean-Claude Gallotta à la fin des années 70, du groupe Emile-Dubois, considéré comme élément fondateur de la nouvelle danse française. Une figure qui le couve encore du regard.
Comme le font Patrice Delay et Sean Wood, les deux directeurs du Ballet Junior de Genève, où il se forme pendant trois ans après le conservatoire. “Quand j’y suis allé, j’ai fait une audition moyenne, mais ce sont des gens qui croient au potentiel, ils m’ont fait confiance. Aujourd’hui encore, Sean est toujours de bon conseil, il a un point de vue différent, du recul, c’est très précieux.

MAÎTRES À DANSER

Et puis sa route croise celle de monstres sacrés, de ceux qui prennent de la place, transforment la matière, font vibrer l’air. Le premier, c’est le détonant Hofesh Shechter, qui s’impose depuis une décennie comme l’une des figures les plus reconnues de la scène internationale, et avec qui il travaille pendant un an, à Londres. “La meilleure chose qui me soit arrivée dans ma carrière, c’est d’entrer dans sa compagnie et d’en sortir ! C’est un génie du mouvement, il a révélé des qualités de corps nouvelles pour le public et il y a chez lui les meilleurs danseurs que je n’aie jamais rencontrés. Il a changé ma perception des choses, m’a amené à un haut niveau, mais il a une patte précise, très identifiable. Quand je suis parti, ça m’a forcé à chercher autre chose, à me demander comment j’avais envie de danser.
Pour définir les contours de son propre langage, en 2014, Edouard crée donc Beaver Dam, sa compagnie. En parallèle, il continue à danser pour les autres, et notamment pour une autre bombe des plateaux, l’explosif Olivier Dubois. “J’ai commencé avec Tragédie –pièce dansée entièrement nu– , puis Prêt à Baiser, pour laquelle on se roule une pelle pendant 30 minutes. C’est une vraie performance physique, parfois même assez violente, mais j’ai accepté de le faire avec lui, car c’est quelqu’un d’incroyable, de solide. Il a été aussi le mentor pour une de mes créations, en studio, et m’a clairement fait gagné 10 à 15 ans de vie artistique en 3 minutes, m’a appris que tout est possible.

Tout, et partout. Aujourd’hui à Annecy et Genève, demain en Autriche, en Israël, au Japon ou au Panama, Edouard Hue est comme le castor (beaver en anglais) qui construit son barrage (dam), il bâtit sa carrière petit à petit, de scène en scène, toujours conscient de sa chance : “je suis un diesel, je préfère prendre mon temps plutôt qu’exploser. Je veux pouvoir faire mes choix pour les bonnes raisons, parce qu’artistiquement je m’éclate, pas pour qu’on parle de moi.” Edouard veut rester libre, quoi… Une Hue-topie ?

EDOUARD, TON ENDROIT POUR…

… en prendre plein la vue ?
Le Pâquier avec la vue sur le lac d’Annecy et les montagnes, c’est tellement vaste et panoramique ! J’y vais tôt, avec ma petite famille, et ce mélange de gris, de vert… Par tous les temps c’est magnifique !

… buller ?
Sur la promenade Sainte-Thérèse du Québec (derrière le quartier de la Mandallaz à Annecy) dans le virage, il y a un petit escalier qui descend à gauche, et je me pose sur les bancs à côté de l’eau, accompagné d’un manga bien sûr ! J’ai l’impression d’être un petit papy…

… faire la fête ?
Je ne suis pas vraiment un oiseau de nuit, les boîtes, tout ça, c’est pas mon truc, je préfère aller chez mes potes. Mais j’aime bien retrouver les amis d’enfance pour un pot au Finn Kelly’s Irish Pub dans la vieille ville.

… manger ?
Une Autre Histoire, rue Royale, c’est simple, raffiné, quasi gastro. Chaque fois qu’on y va, c’est du lourd !

… se nourrir l’esprit ?
L’atelier du peintre Marc Limousin, Côte Perrière dans le vieil Annecy. Tu es en pleine ville, dans le réel, et dès que tu franchis la porte de son atelier, que tu entres dans son univers, c’est un autre temps, un autre espace, c’est coloré, épuré, très puissant.

Ton endroit doudou, celui où tu vas pour te ressourcer ?
La Promenade du Thiou en direction de Cran-Gevrier, tu te retrouves au bord de l’eau dans la forêt, avec l’odeur présente de la nature, ça fait du bien ! Tu as vraiment l’impression d’être dans un bois, plus du tout en ville, et je trouve ça assez rare.

+ d’infos : http://beaverdamco.com
« Yumé » du 24 au 26/09/21, salle du Lignon, à Vernier, Suisse.
« Molten », le 18/11/21 à l’OCA de Bonneville.

©Grégory Batardon

Mélanie Marullaz

Mélanie Marullaz

Journaliste SURNOM: Poulette. PERSONNAGE DE FICTION: Elastigirl. OBJET FETICHE: mon oreiller. ADAGE: à chaque Barba-problème, il y a une Barba-solution. (philosophie Barbapapienne) JE GARDE: mes épaules. JE JETTE: mes grosses cuisses de skieuse. DANS 20 ANS? la tête de mon père sur le corps de ma mère. presse@activmag.fr

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