dans la famille veyrat…

26 Jan 2018

tout feu tout femme

Pas facile tous les jours d’être la fille de Marc Veyrat ! Et ce n’est pas sa fille Carine, qui va dire le contraire. Entre liens du sang pour carburant et quête d’identité, la chef pâtissière va remuer ciel et terre pour faire sa place derrière les fourneaux, sans être dans l’ombre de son père. C’est pas du gâteau !

Marc et Carine Veyrat

« Parce que mon père est chef, j’aurais dû naître avec un fouet dans les mains et savoir faire une crème brûlée dans mon berceau ! »

Arrivée à pieds joints dans un bouquet garni, pour Carine, 4ème génération d’une famille de cuisiniers, la route est déjà toute tracée. Originaire de Manigod, la petite Heidi des montagnes, rêve d’animaux en pleine nature, de chalet et de liberté ! “Je me souviens des moutons en plein air ; de la jument qui venait jusqu’à la cuisine chercher ses carottes et des chiens. Mon père retournait les casseroles en cuivre de la maison, prenait une spatule en bois pour les appeler et toute la meute arrivait du talus à en faire trembler la terre, c’était tellement beau ! » 

Mais de Manigod à Chavoires en passant par Veyrier, Carine va plutôt grandir au rythme des services. Entre dîners, déjeuners, fumets et petits bouillons, elle noue finalement son tablier et bat le fouet pour devenir la crème des pâtissières.

AU BAIN-MARIE…

Son parcours va trancher entre belles ren­contres, jalousie et tas d’embûches ! Après avoir obtenu son CAP en 1992 sous l’aile de Monsieur Saffré, maître d’apprentissage à l’école hôtelière d’Annecy, Carine travaille un an pour son père comme commis, mais a des envies d’ailleurs. Pas très emballé à l’idée de la laisser partir, mais convaincu que faire ses armes est indispensable, Marc Veyrat lâche du leste. Illico presto, Carine prend sa valise direction Paris, idée bien précise en tête ! “Mon but était d’aller chez Pierre Hermé. Mais en attendant qu’une place se libère, mon père m’avait fait rentrer chez Alain Passard. Pour décrocher mon stage chez Pierre, j’avais pris le nom de Carine Durebex (le deuxième nom de son père). Je ne voulais pas qu’on me prenne juste parce que j’étais la fille de Marc Veyrat. J’avais besoin de me créer une identité. »

Refusant toute complaisance, Carine n’hésite pas à insister, quitte à faire du forcing. Bingo, persévérance payante, elle décroche un entretien et quand Pierre Hermé lui demande la profession de ses parents, culottée, elle répond sans sourciller : “Mes parents ont un restaurant, mais vous ne le connaissez pas. C’est un petit boui-boui au bord du lac d’Annecy ! » Quelque temps plus tard, une tape amicale sur l’épaule, il lui rend monnaie de sa pièce : “Très modeste le petit boui-boui au bord du lac ! » Il avait découvert le pot aux roses, mais Carine avait réussi à toucher son but, seule, une belle fierté ! Elle y reste une petite année, puis dépose ses bagages chez celui quelle surnomme avec tendresse Papa Troisgros : “J’étais à 6 heures dans les cuisines pour préparer mes pâtisseries, lui, arrivait à 7 heures pour faire cuire les carrés d’agneau, on se parlait de loin, on se respectait beaucoup, c’est un merveilleux souvenir. »

Mais tous les souvenirs ne sont pas aussi succulents. Carine et son baluchon ont fait étape un peu partout. Baroudeuse dans l’âme, la soif d’apprendre pour compagnon de route, entre Québec, Oxford ou Chicago, à Paris ou en province, elle s’est nourrie des plus grands chefs étoilés, d’expériences exceptionnelles, mais aussi de coups bas pestilentiels : “Dans certaines maisons, j’ai vraiment été traitée comme une moins que rien. Parce que j’étais la fille de, j’ai même fini à faire mes pâtisseries au néon, dans des caves… » Quand on connaît le parcours du combattant des femmes dans les brigades, y’a de quoi finir dans les choux ! Mais c’est mal la connaître !

Après une nouvelle escale à la capitale, chez Hélène Darroze, forgée, elle rentre finalement au bercail pour une saison de choc’ à La Clusaz auprès de Dominique Gelle, puis embarque pour 15 ans, hiver comme été, dans les cuisines de son père. Pas vraiment un rythme de croisière !

ATTENTION, ÇA BOUT !

“Quand je suis rentrée à Veyrier, Papa venait d’avoir deux étoiles et tout était sous pression. J’en ai bavé 3 ans avant qu’il ne me confie une brigade, mais ne pouvait pas risquer sa carrière non plus. A 23 ans. il m’a promue plus jeune chef étoilée, c’était vraiment chouette. Je lui dois beaucoup. » Beret de son arrière-grand-mère Aline en guise de toque, Carine a 24 ans quand son père décroche une 3ème étoile dans les restaurants de Veyrier et de Megève. Si la jeune femme ne tarie pas d’éloges sur les grands chefs qui ont marqué son parcours, son père est lui, au cœur de tout. “Il m’a rendue piquée, c’est dans le sang, ça se régénère tout le temps. Je suis très proche de lui, en tant qu’enfant et en tant que professionnel. Encore aujourd’hui, on est plus liés que jamais, même si c’est un père pudique, qui ne dira jamais sa fierté ni son amour pour moi. Il le dit aux proches, aux clients qui, eux, me le soufflent. »

Alors quand elle décide de voler de ses propres ailes, il en fait tout un flan : “Quand il a su que je cherchais un fonds de commerce, il est parti en sucette ! Il faut dire que chez nous c’est 14 juillet tous les jours ! Même si c’est très vite oublié. Pour lui, c’était l’évidence, il m’a ouvert les portes de son ancien restaurant de Chavoires, m’a fait toute la construction et m’a donné les rênes ! »

Octobre 2006, la Reine-Des-Prés sort de terre… Reine ? Un peu pompeux non ?“Mon père, c’est l’hymne des plantes, la reine-des-prés est une plante ! Je l’ai découverte avec lui, c’est ma préférée. J’adore sa subtilité et son goût d’amande. Magnifique en termes d’alchimie, elle ne se marie pas forcément avec tout, c’est aussi ce qui fait son originalité. Appeler mon restaurant La Reine des Prés, c’est un clin d’œil à mon père certes, mais surtout à ma plante favorite, c’est très féminin avant tout ! Certains ont bien sûr sauté sur l’occasion pour dire que je me prenais pour une reine, mais que voulez-vous… « 

C’EST PAS DE LA TARTE !

Si le gros – ce que d’autres appelleront «mauvais» – caractère est une histoire de famille, inutile de préciser que Carine n’a pas dérogé à la règle, connue pour son tempérament de feu. On attendait la fille Veyrat au tournant, qu’à cela ne tienne, elle porte l’héritage d’une famille de toqués : “Et encore… Je me suis beaucoup calmée, mais j’avoue qu’au départ je hurlais et j’envoyais tout paitre dans la cuisine quand une assiette n’était pas à la hauteur de mes attentes ! Intérieurement, ça me révoltait, parce qu’à travers moi, ça touchait l’âme de mon père et ça, c’est impensable ! Quand tu bosses dans un 3 étoiles, c’est psychologiquement éprouvant. Tout doit être anticipé, tout le temps, le moindre détail passé au crible. Si on pouvait dépasser les 3 étoiles Michelin, j’en donnerais au moins 3 milliards à mon père, pour sa cuisine et tout le reste et tout autant à ma mère d’avoir supporté une telle pression pendant 25 ans. Le nombre de fois où j’ai vu mon père lui faire goûter des sauces en pleine nuit… Toute cette perfection, c’est d’un autre monde ! »

Alors si Carine est formatée au rythme des exigences 3 étoiles, elle n’en fait pour autant pas la course. “J’ai trop vu mon père souffrir de cette tension qui a parfois des répercussions terribles. Et quand bien même, j’aime le goût de la cuisine, je suis pâtissière avant tout et pour être franche, convoiter les étoiles serait en quelque sorte rivaliser avec mon père et ça c’est perdu d’avance ! Je préfère m’éclater dans mon bistrot. Tant que les étoiles brillent encore dans mes yeux…”

Vous prendrez bien une petite bouchée, à la Reine ? Si, si, elle insiste !

+ d’infos :
lareinedespres
.fr

Ça vous a mis l’eau à la bouche ?

Pour découvrir la recette des matafans à l’ail des ours de la famille Veyrat, c’est ici que ça se passe.

© H’s pictures, © Lara Ketterer

Magali Buy

Magali Buy

SURNOM : Mag... (d'ailleurs activ'mag c'est pour moi, non ?) PERSONNAGE DE FICTION : Xéna la guerrière OBJET FETICHE : mon piano, il m’écoute, me répond et me comprend mieux que personne. ADAGE : « si tout le monde sait où tu vas, tu n’arriveras jamais à ta destination. Laisse-les croire que tu dors.» JE GARDE : mon mauvais caractère, ma langue bien pendue, mon cœur ouvert et mes yeux verts JE JETTE : mon insécurité, ma cellulite et ma paranoïa... DANS 20 ANS : la même en pire, si c'est possible !

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