terre à quotas
17 ans. La parité en politique est une ado. Entre ses pieds un peu trop grands – mais gages de stabilité, ses fringues un peu trop courtes, quelques points noirs par-ci par-là et un rien de paresse, elle est déjà formée et affirmée, mais elle se cherche encore. En tout cas, elle est pleine de promesses.
Constat sans appel : sans contrainte législative, pas de parité. En juin 2000 donc, la loi impose, les assemblées disposent. Et ça marche, car globalement, au niveau régional, la parité est très vite atteinte. Depuis les élections de 2015, en Auvergne-Rhône-Alpes, 47,1% des conseillers régionaux sont donc des femmes. Au niveau départemental, c’est plus récent. Logique, puisque ce n’est qu’en 2013 que les électeurs de chaque canton doivent élire un binôme composé d’un homme et d’une femme. Un coup de baguette magique n’aurait pas été plus efficace : l’égalité parfaite est atteinte aux élections de 2014, avec une part de femmes multipliée par 4 dans les assemblées départementales (elle n’était que de 11% en 2011). Le Haut Conseil à l’Egalité applaudit, et nous aussi.
POLITIQUE ET MATHÉMATIQUES
Dans les conseils municipaux, c’est moins fulgurant. D’un tiers des élus en 2001, les femmes sont passées à 42% en Auvergne-Rhône- Alpes depuis les élections de 2014. C’est mathématique, car la règle d’alternance homme/femme sur les listes concerne à présent toutes les communes de plus de 1000 habitants (elle ne s’appliquait qu’à celles de plus de 3500 avant 2013). Là aussi, comme par magie, 48% des conseillers municipaux sont à présent des femmes. Dans les petites communes cependant, qui ne sont pas soumises à ces contraintes paritaires, elles ne représentent que 36% des élus.
EQUITÉ HELVÉTIQUE ?
En Suisse, pas de quotas. Malgré les sièges obtenus de haute lutte depuis 1959 sur le plan communal et cantonal et, après 1971, au niveau fédéral, on est encore loin de la parité en politique. La représentation féminine n’a cessé de progresser, mais elle a tendance à stagner. Dans les exécutifs et législatifs municipaux, par exemple, elle varie entre 26 et 30% depuis 2011. Au niveau cantonal, en 2015, la proportion de femmes était de 24% dans les législatifs et 27,1 dans les exécutifs : c’est la valeur la plus élevée jamais atteinte, YEAH ! Mais elle n’a augmenté que de 0,9 points en 4 ans… Yeah quand même, mais les bras un peu moins hauts… Mais exécutif, législatif, kezako? Je vois bien que je vous ai perdus… Chaussons donc lunettes, craie et tableau noir. Postulat de base : chaque canton suisse est un état. L’exécutif, ou conseil d’états serait donc l’équivalent de notre gouvernement ; avec autant de ministres femmes que de ministres hommes, il est paritaire dans sa version française, un peu moins dans la version confédérés. Le législatif, lui – parce que je vois bien que vos yeux pétillent de curiosité – serait l’équivalent de notre assemblée nationale, dans chaque canton.
PARLEMENTONS
Jetons-y d’ailleurs un œil, à notre législatif hexagonal, car il ne fait pas le malin non plus. En 2017, près des 3/4 des parlementaires français sont des hommes. La loi prévoit des pénalités financières à l’encontre des partis qui ne respectent pas la parité pour les investitures aux élections législatives. Mais ces sanctions (dont le montant doublera en juin) ne suffisent pas à rétablir l’équilibre politique au profit des femmes. Ces dernières peuvent également se voir attribuer des circonscriptions moins «gagnables». En 2012 par exemple, 40% de femmes étaient candidates au 1er tour des législatives en Auvergne-Rhône-Alpes, pour n’occuper finalement que 17 sur 64 sièges alloués à la région au sein de l’hémicycle, soit 27%. Tiens ? Tout pareil que nos voisins… Le Sénat, lui, s’est féminisé à peu près au même rythme que l’Assemblée et les femmes y restent, de la même manière, minoritaires. En Auvergne-Rhône-Alpes, on compte ainsi 10 femmes pour 38 sièges de sénateurs.
PLAFONNÉES
Mais il ne faudrait par qu’un arbre de chiffres cache une forêt de réalités sur le terrain. La parité numérique, oui, c’est bien, mais les postes de pouvoir et de décision restent, dans les faits, surtout dévolus aux hommes.
Ainsi, en 2015, tous les départements d’Auvergne-Rhône-Alpes, sont, à l’image de la région, présidés par des hommes. A la tête des communes, on trouve un peu plus de femmes que dans les présidences de région ou de département. Malgré tout, elles n’en administrent encore que 16,6% en Auvergne-Rhône-Alpes. C’est à l’échelon des petites communes, moins politisées et plus « quotidien » qu’elles sont fréquemment cantonnées. Avec seulement 13%, la Savoie est le département, avec le Cantal, qui compte le moins de maires femmes dans les communes de moins de 1000 habitants. Cette part tombe à 12,9% dans les communes dépassant le millier d’habitants, reflétant la persistance d’une partition sexuée du pouvoir politique, alors même que les conseillers municipaux respectent la parité. Albertville figure ainsi parmi les rares communes de plus de 10 000 habitants de la région à être dirigée par une femme, Martine Berthet.
La répartition des «compétences» reste, elle aussi, très sexuée. Les portefeuilles considérés comme les plus stratégiques (finances, économie, transports) sont majoritairement confiés à des hommes, alors que les compétences sociales, familiales, liées à la santé ou à l’école, ainsi que les affaires culturelles sont souvent dévolues aux femmes… Il faudra encore une bonne dose de détermination à notre ado-parité pour bousculer ces schémas stéréotypés.
Sources : Les femmes et la vie politique locale – Bien représentées dans les assemblées, minoritaires aux postes clés – Serge Maury, Anna Simon – Insee Analyses Auvergne-Rhône-Alpes – Mars 2017.
Werner Seitz, Les femmes et les élections fédérales de 2015 : L’élan est retombé – Commission fédérale pour les questions féminines – Juin 2016
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