marie bochet

13 Jan 2020

la reine des neiges

PYEONGCHANG – MARS 2018. DANS LES COURBES DU SLALOM, MARIE BOCHET DÉCROCHE LA MÉDAILLE D’OR. C’EST SA 4E SUR CETTE PARALYMPIADE CORÉENNE, LA 8E DE SA CARRIÈRE. MÊME S’IL EST DIFFICILE DE COMPARER LES SPORTIFS, MARTIN FOURCADE, LUI, EN COMPTABILISE 7, PAS TOUTES DORÉES. ALORS RENDONS-LUI DONC JUSTICE : EN RAPPORTANT AUTANT D’OR, LA JEUNE HANDISKIEUSE DU BEAUFORTAIN EST… ROYALE, NON ?

Pas de grosses échéances pour 2019-2020. En cette fin novembre, Marie Bochet revient de Tignes où elle s’est entraînée, mais cette année, elle lève le pied, l’objectif, c’est de se reposer. Et c’est mérité. Car en fin de saison dernière, elle a rajouté cinq titres mondiaux à son tableau de médailles, en s’imposant dans toutes les épreuves individuelles : slalom, géant, descente, super G et super-combiné. Le Grand Chelem, quoi. Pour la 3e fois. Et à seulement 25 ans. Un palmarès qui force le respect, fiche des frissons. Pas forcément de froid, quoique… En commentant le dernier slalom paralympique de la championne savoyarde, Alexandre Boyon, le journaliste de France Télévisions, l’appelle carrément la «Reine des Neiges». La Reine des Neiges ? Mais c’est vrai, ça, en y réfléchissant bien, maîtrise de l’élément glacé, différence assumée, destin hors du commun… Marie a pas mal de points communs avec Elsa…

Activmag : Elsa a 8 ans quand elle prend conscience de sa différence, est-ce que vous vous êtes sentie différente enfant ?

Marie Bochet : Pas du tout, parce qu’on ne m’a pas élevée dans ce sens-là. Mes parents n’ont pas cherché à me protéger, j’ai grandi comme s’il n’y avait rien de particulier en moi, je n’ai jamais été assistée, ils m’ont appris à me débrouiller. Souvent, je donne l’exemple du laçage de chaussures, mais ma maman m’a appris à le faire comme elle l’a appris à ses trois autres enfants. Je n’ai ressenti la différence que le jour où j’ai eu ma 1re prothèse, pour le ski. Je me suis rendue compte que s’il fallait m’ajouter quelque chose pour performer, c’était donc qu’il me manquait quelque chose. C’était après les Jeux de Vancouver. J’avais 16 ans.

Jusque-là vous aviez toujours refusé les prothèses. Pourquoi ?
En fait, ce handicap, il a été connu avant ma naissance, ce n’était pas une surprise.
Mes parents ont eu le temps de l’accepter, et comme ils l’ont accepté eux, je pense que moi je l’avais déjà accepté à ma naissance, je n’ai donc jamais eu besoin de le cacher. Et je n’ai pas un moignon classique, j’ai ce petit doigt hyper utile qui me permet de faire un tas de choses assez précises.

Vous vous êtes longtemps entraînée avec les valides d’ailleurs…
Oui, ma première licence handisport, je l’ai prise en 6e, mais depuis mes 5 ans, j’avais toujours pratiqué le ski avec les enfants de mon âge. J’ai rencontré un super entraîneur, Jean-Michel Berthod, qui m’a emmenée dans le groupe, qui s’est débrouillé avec ce bâton unique et qui ne s’est pas demandé si ça allait être possible ou compliqué.

 

Elsa, elle, finit par faire de cette différence sa plus grande force, c’est votre cas aussi ?
Exactement. Mon petit doigt m’a ouvert des portes qu’une main gauche à cinq doigts n’aurait pas forcément pu. C’est ma petite clé ! Il m’a fait découvrir le milieu du handisport et m’a offert cette carrière. Je ne sais pas ce qu’elle aurait été dans le milieu valide, mais peut-être plus limitée. C’est aussi toute une vie faite de rencontres et d’expériences qui a été ouverte par ce handicap-là. Mais attention, c’est un petit handicap, qui ne m’empêche pas de faire grand-chose dans la vie de tous les jours, il n’est pas contraignant comme d’autres. Donc, c’est vrai que je peux dire que c’est une chance.

A l’adolescence, Elsa se prépare à monter sur le trône, et vous à 16 ans, c’est déjà le podium olympique que vous frôliez des spatules…
C’était en 2010 aux Jeux de Vancouver. Cette saison-là, je gagne une 1re Coupe du Monde et je suis en tête de la discipline du slalom, il y a donc quand même des choses possibles et réalisables. Mais je pense que je n’étais pas assez mature pour cet événement. Sur le circuit handisport, on était assez protégés des médias, on n’avait pas l’habitude d’avoir des caméras braquées sur nous, ni beaucoup de public. Du coup, c’est vrai que là-bas, c’était énorme et je me suis faite dévorer… Mes deux quatrième place ont été une énorme frustration, mais c’est aussi ce qui a fait que j’ai rebondi et commencé cette carrière l’année d’après avec de belles performances…

Aux Jeux de Pyeongchang, en 2018, après la dernière épreuve et votre 4e médaille d’or, on a senti une véritable émotion, vous étiez libérée, délivrée ?
Oui, c’est un peu ça ! Les autres médailles, j’étais allée les chercher aussi, mais celle qui me manquait vraiment, c’était le slalom que j’avais raté à Sotchi, 4 ans plus tôt. Du coup, je me mettais une pression supplémentaire sur cette épreuve. C’était la dernière des Jeux pour moi, mais aussi pour la délégation. Alors, en tant que porte-drapeau, j’avais à cœur de finir de la plus belle façon. Et c’était aussi un peu la délivrance. Quand ça fait 4 ans qu’on se prépare, le dernier jour, on est entre «c’est déjà fini» et «enfin, c’est terminé», parce que c’est hyper épuisant, qu’on sait qu’on va retrouver nos proches et fêter ça avec eux… Il y avait donc énormément de choses qui reposaient sur cette médaille-là, donc forcément, l’arrivée a été encore plus forte en émotions.

Elsa a un pouvoir magique, c’est ce qui fait sa force… Qu’est-ce qui fait celle d’une championne ?
Une énorme part de mental déjà, qui fait qu’un athlète peut se décomposer un jour ou au contraire se révéler. Il y a aussi une réelle question d’entourage : famille, amis ou staff, il y a toujours énormément de monde autour d’un athlète. Et avoir un entourage sain et constructif, présent mais pas trop, c’est hyper important. Après, il y a évidemment beaucoup d’entraînement, de travail, et d’abnégation aussi, parce qu’on a vraiment une vie extraordinaire et particulière, mais qui demande énormément d’investissement.

Et si vous aviez un pouvoir magique, vous aussi, ce serait lequel ?
J’aimerais voyager en claquant des doigts, parce que les déplacements sont vraiment quelque chose qui me pèse. Ça me simplifierait donc vraiment la vie !

Le Sage Troll dit à Elsa que son pire ennemi, c’est la peur. Quel est le vôtre ?
Ça pourrait être la peur aussi… Je ne suis pas une tête brûlée et c’est vrai que j’ai parfois un peu de mal à prendre des risques, à m’engager.

Vous dites que vous êtes accro à la compèt’, et la défaite ? Est-ce qu’on s’y prépare ?
Ma préparatrice mentale vous dirait non, parce qu’il ne faut pas penser à ce genre de choses, rester positif et constructif, mais bien sûr que c’est dans un coin de ma tête. Quand on est toujours 1re, il y a un jour aussi où on va être 2e, puis 3e, puis 4e… Si je continue ma carrière actuellement, c’est aussi parce que j’ai envie de m’exposer à ça, de savoir si je serais capable de rebondir et d’apprécier tout autant la compétition et mon sport, malgré des résultats un peu moins exceptionnels.

Elsa, elle, n’a pas à s’inquiéter de sa carrière, elle devient reine et puis c’est tout. Et vous, vous envisagez l’après ?
Oui, et de plus en plus, parce que l’année dernière, je ne savais pas encore si je me sentirais capable d’aller jusqu’à Pékin. Ce n’est pas facile de se projeter sur 4 ans, ça me semblait tellement loin, donc il a fallu que je me pose certaines questions. Maintenant, je vois mon avenir sur les skis jusqu’aux Jeux de Pékin, mais certainement pas sur les suivants. Les fins de carrière sportives, c’est hyper effrayant, c’est un grand vide. Là, je sais que je vais faire ma saison, qu’en avril, je vais être en pause jusqu’à mi-mai, et qu’à la mi-mai, on reprend la préparation physique… Le jour où on arrête, on ne sait plus trop ce qu’on fait le lendemain, c’est vertigineux. Il faut s’y préparer au mieux. Donc j’essaie de garder un pied dans les études, je suis inscrite à Sciences Po Paris, et de commencer à me projeter…

Elsa porte peut-être des robes de din- gues, mais vous, vous défilez quand même pour l’Oréal…
Oui, moi aussi j’ai des robes de dingue ! Ça, c’est exactement le genre d’expériences que ce petit doigt m’a apportées. C’est incroyable, je ne pensais pas être un jour l’égérie d’une marque de beauté comme L’Oréal Paris et c’est vrai que c’est une drôle d’expérience. C’est un milieu qui est vraiment différent de celui que j’ai l’habitude de côtoyer, mais c’est hyper enrichissant et je suis assez fière de représenter la femme française avec un handicap pour l’Oréal.

La Reine des Neiges, c’est surtout une histoire de fraternité. Vous avez 3 frères et sœurs, quelles sont vos relations : plutôt fusionnels, chiens et chats, indépendants ?
Un peu tout ça en même temps. En grandissant, on est devenus très fusionnels, mais ils habitent tous à Paris, donc on se voit un peu moins. Mais on est vraiment une famille soudée et on essaie au maximum de passer des moments ensemble, de garder ce lien très fort. Tout en restant chiens et chats quand même, parce qu’on est des frères et sœurs, et que sinon, ce ne serait pas drôle.

Quand il dégouline devant la cheminée, Olaf dit à Anna qu’il y a des gens qui ont le pouvoir de vous faire fondre, et vous, qui vous fait fondre ?
Mes neveux et nièces, et mes filleuls. J’ai envie d’être avec eux, il y a carrément des manques physiques. Ce sont des relations dont j’ai besoin, un amour vrai et inconditionnel. Je trouve ça super fort…

 

FAN DE…

Votre actrice préférée ?
J’aime le naturel de Julia Roberts, ce qu’elle représente, ce sourire magnifique qui inspire. Meryl Streep est aussi merveilleuse, elle incarne ses rôles d’une façon incroyable et peut tout jouer.

La chanteuse que vous doublez sous la douche ?
Céline Dion pour la douche. Sinon j’écoute beaucoup le duo féminin de First Aid Kit, leurs chansons m’ont accompagnée aux derniers jeux («Stay Gold» notamment). Sinon en chanson française, Angèle.

Quelle est l’artiste dont vous adoreriez avoir une création chez vous ?
Nikki de Saint Phalle, ses nanas sont géniales, j’aime beaucoup l’énergie qu’elles dégagent.

Votre styliste préférée ?
Ma cousine Juliette (Juliette Design), toute petite dans le milieu, mais si talentueuse. J’aime la fraîcheur de ses créations, je ressens sa passion.

Quelle est la femme humoriste qui vous fait mourir de rire ?
Blanche Gardin, elle dérange, elle questionne, elle fait rire, elle est géniale ! Nicole Ferroni est assez passionnante aussi.

L’auteure que vous dévorez ?
Actuellement je lis le livre de Marie Dorin Habert, ancienne biathlète et non auteure de métier. J’aime sa façon d’écrire et de décrire. Elle transmet énormément de choses en toute simplicité, ses chroniques sur les réseaux se dévorent.

Quelle est la championne que vous admirez ou avez admirée ?
Il y a tant de sportives inspirantes que je ne saurais choisir ! Lindsey Vonn pour son ski et la maîtrise de sa notoriété, Marie Amélie Le Fur pour sa capacité à gérer tous ses projets de front (carrière sportive, engagement paralympique, famille). Marie José Perec pour sa carrière majuscule et sa sensibilité.

Votre femme de média préférée ?
Charline Vanhoenacker. J’écoute régulièrement l’émission Par Jupiter sur France Inter, j’aime bien, c’est frais, décalé. Elle gère sa troupe d’une main de maître.

Quelle est la femme politique qui vous fascine le plus ?
Simone Veil. Elle représente tant de combats…

La femme de l’histoire que vous admirez ?
Toutes celles qui ont mis un pied là où c’était interdit, qui ont sauté les barrières et qui se sont imposées face aux hommes.

Votre héroïne ?
Pas facile de choisir, Hermione dans Harry Potter.

© L’Oreal Paris / © Luc Percival /CPSF

Mélanie Marullaz

Mélanie Marullaz

Journaliste SURNOM: Poulette. PERSONNAGE DE FICTION: Elastigirl. OBJET FETICHE: mon oreiller. ADAGE: à chaque Barba-problème, il y a une Barba-solution. (philosophie Barbapapienne) JE GARDE: mes épaules. JE JETTE: mes grosses cuisses de skieuse. DANS 20 ANS? la tête de mon père sur le corps de ma mère. presse@activmag.fr

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