mathilde allemand : la marque lyonnaise canon et éthique

10 Sep 2018

fashion révolution

Pièces intemporelles, petites séries, collections réalisées à la main, coupes simples et efficaces, made in France… la marque lyonnaise ultra-minimaliste (et ultra-canon) de Mathilde Allemand réveille sacrément notre dressing. Et notre conscience : cette créatrice prouve que mode et combat féministe ne sont pas antinomiques.

Mathilde Allemand

lle a 28 ans, beaucoup d’allure et un discours hyper mature. Cette styliste, major de promo 2014 de l’Atelier Chardon Savard et passée par les coulisses de Faustine Steinmetz et Gareth Pugh à Londres, prône une mode réfléchie, loin de l’hyper consommation. Sa lubie ? La Slowfashion. Comprendre «consommer mieux, mais moins». Chacune de ses pièces est produite en France, en petite série uniquement. Elle sélectionne ses tissus à Paris (elle veille à n’acheter que des matières fabriquées dans l’hexagone), coupe et tisse le tout dans son atelier lyonnais avant d’en confier la confection à des artisans de Beaurepaire. “La conscience écologique ne m’est venue qu’il y a trois ou quatre ans. Je suis devenue Zéro déchet et… végétarienne aussi !”.

Un peu en même temps que l’envie de créer sa propre marque de vêtement. “Je n’ai pas fait exprès de monter ma marque, en réalité. Je refusais même de le faire, je trouvais qu’il y en avait déjà trop sur le marché, qu’on consommait beaucoup trop en somme.” Et puis, alors assistante DA sous la direction de Déborah Amaral chez Panthéone à Paris, elle commence à prototyper, réaliser des patrons, imaginer une collection de pièces intemporelles en petites séries oscillant entre japonisme et lignes épurées, puis se lance dans une campagne de crowfunding “pour voir”. C’est une réussite. Elle se lance (ouf !).

J’AIME L’ÉROTISME VU PAR LES JAPONAIS : MOINS ON EN VOIT, PLUS ON A ENVIE D’EN VOIR.

UNE INSPIRATION NIPPONE

Les matières sont nobles (drap de laine, coton, jacquard, mousseline…), les lignes épurées, les coupes amples. C’est zen, sans chichi et élégant. Et sexy, aussi. Ses inspirations ? Le grand et avant-gardiste Yohji Yamamoto, adepte des silhouettes larges et fluides, l’excellent Issey Miyake et ses créations minimalistes, pratiques et confortables, et l’ultra novateur Junya Watanabe. “J’aime l’érotisme vu par les Japonais : moins on en voit, plus on a envie d’en voir. C’est grâce à eux, entre autres, que j’ai compris ce que signifiait «être sexy»”.

L’oversize est sexy : tout est suggéré, subtil. Idéal pour narguer l’hiver qui arrive à grand pas. “Mes pièces peuvent aller à une grande majorité de femmes, je ne propose que de la taille haute, d’ailleurs. J’essaie de toucher toutes les femmes, toutes les morphologies, tous les âges.” Elle le prouve dans ses collections, mais aussi dans son lookbook. Mathilde n’hésite pas à aborder les femmes qui l’interpellent par leur aura dans la rue, le métro ou à la gare pour leur proposer de poser avec l’une de ses créations. Elles sont toutes différentes, mais toutes solaires.

GIRL POWER

Mathilde ne propose que deux collections, dans lesquelles, évidemment, elle privilégie la qualité à la quantité : printemps-été «1994» et automne-hiver «Lines».

On a particulièrement été sensible à sa dernière collection «1994» qui, au-delà d’être canon (on l’a déjà dit, oui), assume un engagement féministe. Mathilde exècre le patriarcat (et elle a bien raison) et a donc décidé de faire une collection qui lui ressemble (simple et efficace).

Le top Simone B. fait référence à la grande Simone de Beauvoir, militante et activiste du Mouvement de Libération des Femmes (MLF) des années 1970, la robe Olympe de G évoque Olympe de Gouges, considérée comme l’une des pionnières du féminisme français (XVIIIème siècle), la chemise Antoinette remémore Antoinette Fouque, figure historique du MLF et le kimono Malala Y rappelle la militante pakistanaise Malala Yousafzai, icône de la lutte pour l’éducation des femmes et prix Nobel de la paix. “Simone de Beauvoir a dit «N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question.» Les femmes représentent la moitié de l’humanité, et sont pourtant toujours considérées dans certains pays comme une minorité à encadrer. Le combat pour le droit des femmes est, aujourd’hui plus que jamais, d’une importance capitale.”

Tellement qu’elle vient tout juste de créer sa chaîne Youtube «Les Causeries de Mathilde» dans laquelle elle interviewe des personnes qui l’inspirent (dont l’illustratrice lyonnaise Diglee, auteure de Libres !, un «Manifeste pour s’affranchir des diktats sexuels»). “Ce sont des causeries, des discussions sans prétention sur les rapports entre la mode et le féminisme.” Une créatrice féministe, engagée et ultra-inspirante. We should all be feminists.

+ d’infos :
shop.mathilde-clothes.com

© Clémentine Marmonier / © Motoki Nakatani

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