quid du féminisme ?

28 Avr 2017

le féminisme est mort ? vive le féminisme !

1er avril 2017. Communiqué de l’association Osez le féminisme : « on arrête. (…) l’égalité, on l’a ! Nous en tirons la conclusion
qui s’impose. aujourd’hui, nous arrêtons
de militer car on a gagné ! ». Une jolie provocation en forme de poisson. Mais c’est vrai, quoi, en matière de droits des femmes, on a déjà tout acquis et c’est gravé dans le marbre, non ?

Dé-Trumpez-vous. L’arrivée à la Maison Blanche d’un candidat aux manières ouvertement sexistes et aux idées conservatrices, qui vient de bloquer le financement d’ONG internationales soutenant l’avortement et d’interdire le transfert d’argent public à toute clinique américaine le pratiquant, secoue nos certitudes de l’autre côté de l’Atlantique.

Petit tour d’horizon : 2 femmes sur 11 candidats à la présidentielle française, dont un se positionnant clairement contre l’IVG ; affaire Baupin classée sans suite pour prescription en mars dernier ; témoignages de politiciennes suisses contre le sexisme ambiant au parlement ; découverte de la réalité du harcèlement de rue à Lausanne – selon une enquête menée par l’Observatoire de la Sécurité, 72% des femmes de 16 à 25 ans interrogées y ont été confrontées au moins une fois en 2016 ; la photo d’une mannequin, tête contre un tabouret, fesses en l’air et jambes écartées pour promouvoir une des plus prestigieuses marques de luxe françaises… Etonnantes illustrations de cette égalité que les femmes auraient acquise.

Si les féministes version 2017 ne sont plus tout à fait les mêmes que leurs aînées, si elles ne se battent plus sur les mêmes terrains, ni avec les mêmes armes, elles ont encore toutes les raisons de rester mobilisées.

100% des utilisatrices des transports en commun en France ont été victimes au moins une fois de harcèlement sexiste ou d’agressions sexuelles (source : Haut Conseil à l’Egalité).

MISES À L’ÉPREUVE

“Hargneuse, mal-baisée, anti-hommes, au mieux une lesbienne, au pire, une acariâtre, opposée à féminine… on traîne encore l’image de la féministe des années 70’s hystérique et brûlant son soutif dans la rue !”, déplorent Francesca Cadoux et Emmanuelle Faivre, co-présidentes d’Osez le Féminisme 74 (OLF74), branche annécienne du mouvement national né en 2009, à l’époque où la réforme Bachelot prévoyait des coupes budgétaires pour le Planning familial.

Un cliché pourtant bousculé dans les faits par la multiplicité des mouvances, donc des visages du féminisme au 21ème siècle. Si la lutte, dans les années 70, était principalement associée au MLF, ses groupes de paroles et ses actions marquantes, elle est aujourd’hui portée, en France et en Suisse, par une centaine d’organisations nationales et locales aux profils très différents. Pour Muriel Salle, Maîtresse de conférences en Histoire des Femmes, à l’Université lyonnaise Claude-Bernard, “la diversité des mouvements et des causes fait qu’on ne porte pas un message féministe collectif, on ne fait pas front commun. Comme sur la question du voile ou sur celle de la prostitution qui génèrent des débats importants au sein des différents mouvements. Mais cela permet de souligner que la pensée féministe est à la hauteur des réalités avec lesquelles elle doit composer : complexe. L’avantage, c’est qu’on renonce à l’idée qu’il existe un « éternel féminin », les femmes expérimentant des conditions de vie variées selon leur classe sociale, leurs origines, leur religion… et la maternité n’est pas une condition d’unification de ce groupe. L’inconvénient, c’est que le message est dilué.”

MISES EN BOÎTE

Pour avoir l’air moins menaçant, certains se font limer les dents, d’autres s’épilent les sourcils, le féminisme, lui, est entré dans les gouvernements. Synonyme de grande victoire, mais aussi d’assagis-sement du mouvement, cette institutionnalisation de la cause en a profondément modifié les traits. En 1974, Françoise Giroud prend la tête du secrétariat d’Etat à la condition féminine, mais la connotation marxiste ancre le combat à gauche de l’échiquier politique ; en 1981, Yvette Roudy devient ministre des droits de LA Femme, alors qu’en 2012, Najat Vallaud-Belkacem est en charge des droits DES femmes. Notons au passage que l’évolution même du nom de ces instances reflète la prise en considération de sa multiplicité. Aujourd’hui, avec la mise en place de politiques publiques, et sur le terrain, des chargées de mission, déléguées régionales et départementales en France, bureau de l’égalité dans chaque canton, chaque université ou haute école spécialisée en Suisse, on peut légitimement parler de « Féminisme d’Etat ».

En France, c’est en région Rhône-Alpes-Auvergne que l’écart salarial hommes-femmes est le plus marqué : 20,7% en 2014 (source INSEE). Il est, en moyenne de 20% en Suisse.

MISES EN SCÈNE

Aux instances gouvernementales, donc, les actions de grande envergure, aux assos’, l’information, le soutien, le conseil et la mobilisation. “Les fondements restent les mêmes, il n’y a rien de nouveau dans les idéologies, ni de rupture radicale par rapport au combat des années 70”, précise Armelle Weil, des Nouvelles Questions Féministes, revue fondée par Simone de Beauvoir dans les années 80, aujourd’hui pourvue d’un comité de rédaction franco-suisse basé à Lausanne. “C’est dans les modes d’actions que les choses ont évolué. Apéro-débat, art, danse, théâtre… nous avons créé des changements dans la manière de militer, des dynamiques de groupes différentes pour des mobilisations qui prennent d’autres formes.” “On est plus forcément dans le choc”, confirment les militantes d’OLF74, “mais dans le dialogue, avec humour, pour ne pas braquer, interpeller sans agresser, montrer qu’on peut parler avec tout le monde.” Comme à l’occasion de leur campagne « Marre du Rose », en décembre 2016 à Bonlieu, au cœur d’Annecy, où elles proposaient aux parents et enfants de poser pour une photo « Je ne serai pas une princesse/je ne serai pas un super héros ».

MISES À JOUR

Outils redoutablement efficaces pour sonner le rappel, le web et les réseaux sociaux ont vu fleurir une pléiade de sites, blogs ou pages militantes. “Il y a en effet beaucoup de choses sur Internet, et c’est plus facile de signer une pétition depuis son ordinateur, derrière un écran que de descendre dans la rue. Mais pour s’exprimer sur un blog ou une page Facebook, encore faut-il avoir des compétences rédactionnelles, techniques, et tout le monde n’est pas en mesure de le faire.” tempère Muriel Salle. “Ça ne touche peut-être pas tout le monde, mais la majorité des 15-35 ans quand même”, répond Armelle Weil, lucide. “Ce n’est pas pour autant que les gens vont se mobiliser, mais ça participe aux changements des mentalités. Certains sites permettent de libérer la parole et les esprits, sur les orientations sexuelles, les violences subies, la discrimination, ils montrent aussi l’ampleur de certains phénomènes et participent à créer le débat public” comme « Paye ta Shnek » et ses déclinaisons – Paye ton IVG, Paye ton Psy, Paye ta Blouse -, recueils d’expériences de harcèlement sexiste, ou encore « Je suis Indestructible », plateforme web où témoignent des victimes d’agressions sexuelles.

En Suisse, 7 femmes siègent au Conseil des Etats, elles représentent 15,2% des 46 élus. Elles sont 95, soit 27,3% au Sénat, l’équivalent français de cette assemblée, mais aucune femme n’y représente les départements savoyards.

MISES AU POINT

A l’heure où l’égalité est de rigueur, presque évidente, le féminisme est pourtant bien vivant, vivace même, resterait-il donc des batailles à mener ? “En plein XXIème siècle, dans nos sociétés qui se targuent d’être démocratiques”, rappelle Martine Chaponnière, spécialiste genevoise de l’histoire et de la formation des femmes, “être une femme signifie encore avoir statistiquement moins de chances qu’un homme de s’affirmer professionnellement ou politiquement, disposer d’un revenu inférieur, être moins autonome sur le plan personnel.” Ah voilà, il me semblait bien aussi… “Le désintérêt actuel pour le féminisme tient certainement à la croyance (pourtant démentie tous les jours, si on y prend garde), que l’égalité des sexes est désormais « une affaire qui roule ».”* L’ennemi vient donc parfois de l’intérieur… “Aujourd’hui, il y a d’un côté les femmes « éduquées », bien rémunérées, qui sont dans l’illusion de l’égalité”, confirme Muriel Salle, “et de l’autre, les femmes qui ont des situations moins aisées, qui ont d’autres chats à fouetter, ou qui peuvent le penser en tout cas, car la lutte pour les droits des femmes paraît toujours secondaires par rapport à d’autres luttes perçues comme plus urgentes, contre le racisme ou le chômage notamment.”

MISES EN GARDE

Alors oui, c’est vrai, à une époque où, de part et d’autre du Léman, les grands combats ont été menés par une première vague de suffragettes d’abord, pour le droit de vote et l’accès à un statut de citoyenne à part entière, puis par les militantes des années 70 pour la liberté à disposer de son corps, on pourrait se dire que le gros du job a été fait. “Grâce à leur combat, le contexte a changé, résument les militantes d’Osez le Féminisme 74. « On oublie à quel point elles nous ont fait avancer, mais c’était peut-être plus facile car plus évident : elles se battaient contre le patriarcat, la chape de plomb, d’une manière plus frontale. Aujourd’hui, les « menaces » sont plus insidieuses.”

Insidieuses ? Pas franchement tapis dans l’ombre non plus le sexisme, le harcèlement de rue, les violences physiques ou psychologiques, les stéréotypes dans l’éducation, la non-mixité des filières professionnelles, les inégalités salariales ou autre plafond de verre… Bref, ce n’est qu’un début, il y a encore du boulot !

*Martine Chaponnière, Silvia Ricci Lempen, Tu vois le genre ? Débats féministes contemporains, Lausanne, Éditions d’En bas, 2012.

Y’a pas le feu…

Quand nous caricaturons nos voisins helvètes, c’est souvent leur calme, assimilé à de la lenteur que nous stigmatisons. En matière d’égalité Hommes-Femmes, il faut dire que les choses sont un peu décalées de l’autre côté du Lac. “Nous donnons la priorité à une meilleure conciliation vie professionnelle/vie privée, explique Sylvie Durrer, Directrice du Bureau Fédéral de l’Égalité entre femmes et hommes, à la lutte contre les violences domestiques, contre la ségrégation dans les choix professionnels et la discrimination salariale, avec, par exemple, une charte sur le respect de l’égalité dans le secteur public, signée par 10 cantons et 20 villes, ainsi qu’un projet de loi, prévu pour la mi-2017, envisageant une analyse obligatoire de l’égalité salariale tous les 4 ans dans les entreprises de plus de 50 personnes salariées. On avance donc sur le chemin de l’égalité, mais il ne faut pas oublier que la Suisse est une jeune démocratie, puisque le droit de vote, au niveau national, n’a été accordé aux femmes que depuis 1971. Du fait de notre système très participatif, les discussions sont menées avec l’ensemble de la population et prennent parfois plus de temps, mais une fois les mesures adoptées, elles ont une valeur forte”.

© khabarushka, © vectorpocket; © studiostoks, © Voyagerix, © Delphotostock

Mélanie Marullaz

Mélanie Marullaz

Journaliste SURNOM: Poulette. PERSONNAGE DE FICTION: Elastigirl. OBJET FETICHE: mon oreiller. ADAGE: à chaque Barba-problème, il y a une Barba-solution. (philosophie Barbapapienne) JE GARDE: mes épaules. JE JETTE: mes grosses cuisses de skieuse. DANS 20 ANS? la tête de mon père sur le corps de ma mère. presse@activmag.fr

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