aux chiottes les conventions !
D’ingénieur à designeur, il n’y avait qu’une chasse d’eau à repenser : Vincent Rousseau l’a fait ! Autodidacte, ce passionné de mode féminine va décliner le petit coin en haute couture, avant d’étendre son talent au mobilier d’intérieur.

L’histoire de Vincent Rousseau commence aux toilettes. C’était en 2007, lorsqu’il décide d’abandonner l’ingénierie électrique pour voler au secours des sanitaires Griffon. L’entreprise stéphanoise, appartenant à la famille de sa femme, tombe en désuétude. Pour relancer la boîte, Vincent a l’idée de confectionner des chasses d’eau décalées. Il se dit qu’il y a un vide «sanitaire» sur ce marché (oui, c’était facile!), et imagine détourner des objets pour redonner du luxe aux réservoirs de chasse d’eau des hôtels et restaurants, «Les rendre atypiques». Jerricane, tonneaux, pot à lait, seaux… tout y passe. Et ça marche! Vincent va se réinventer et se révéler comme designer d’objets.
Un jour, un client parisien lui demande de fabriquer les luminaires qui iront avec les chasses d’eau. Pari tenu : Vincent fait appel à des sous-traitants et se lance dans la conception de luminaires. “J’ai tout appris sur le tas. Si j’avais eu du tissu dans les mains, j’aurais fabriqué des vêtements. Là, j’avais de la matière”, se souvient le Stéphanois de 38 ans. Il lance en 2013, et en parallèle de Griffon, sa propre marque: Water Tank Manufacture (WTKM). “Et très rapidement, nous avons eu l’envie d’élargir notre terrain de jeu au design d’intérieur en créant du mobilier”.
SORTIR LA TÊTE DE L’EAU
Lorsque l’aventure Griffon s’arrête il y a deux ans, Vincent Rousseau transforme WTKM en ROVT. Ce sera son bébé. Il devient un accro du boulot, comme pour s’assurer une légitimité. Tout seul, il imagine et confectionne plus d’une quarantaine d’objets, des luminaires aux tables. “Pendant 18 mois, j’étais comme un toxico”. Il travaille le bois, le fer, le verre dans une frénésie créative. Son style, c’est de ne pas en avoir. Son travail est sans concession : “Il y a une part de design, une part de décoration, une part de création artistique. J’aime autant la conception stylistique que technique”.
Ce barbu empreint de sensibilité est tout en contradictions. A la fois cool en apparence, mais très structuré dans sa pensée, à la fois masculin et féminin, à la fois ingénieur et designeur : “à l’image de la nature humaine faite de contradictions et d’ambivalences, ROVT crée des produits décalés, contemporains, extravagants, simples”, résume le hipster stéphanois. Mais ce qui se dégage de Vincent, c’est surtout un perpétuel besoin de se justifier, presque comme s’il s’excusait d’être là.
Le Village des Créateurs l’accompagne dans ses démarches, pour que cet autodidacte du design réussisse le passage d’un projet « très personnel » vers un travail plus professionnel, à travers “une signature, un signe d’appartenance, une marque transversale. Le dénominateur commun est le partage d’une vision décalée des objets, de l’espace (et de la vie) et d’une vision simple du design produit (et de la vie)”, confie Vincent Rousseau, qui est aujourd’hui plus apaisé pour réaliser «l’atmosphère attendue». Il a pris confiance en lui pour “créer des objets identitaires qui serviront à théâtraliser, scénariser, personnaliser les projets des clients”.
Une belle revanche pour celui qui a tiré la chasse d’eau sur les études d’ingénieur que ses parents lui avaient imposées.
+ d’infos : www.rovt-design.com
Photos : Loïc Benoit