VILLES THERMALES : ST GERVAIS-LES-BAINS

17 Fév 2022

ENTRE 2 HAUTS

S’il suffit parfois d’une étincelle, à Saint-Gervais, c’est une goutte qui a donné au village sa vocation touristique, attiré les regards vers ses sommets et leurs ascensions épiques. Mais si, aujourd’hui, la station a toujours les pieds dans l’eau, elle regarde plus vers le haut.

Saint-Gervais-«Mont-Blanc». Depuis 2009, la ville a remplacé «les-Bains» par la référence au toit de l’Europe.
Dans la dynamique de cette station, qui a largement diversifié sa palette d’activités touristiques, voilà donc une évidence : les sports d’hiver et l’alpinisme de haut-niveau ont supplanté, dans sa communication, l’offre thermale.
Elle fut pourtant l’un des facteurs déterminants de son développement. Mais la géographie des lieux en fait un cas particulier dans le paysage des villes d’eaux locales : contrairement à Aix, Evian ou Divonne, cette commune rurale ne s’est pas urbanisée autour de ses thermes. Au début du XIXe siècle, Saint-Gervais est en effet un ensemble de hameaux, dont le bourg se résume à l’église, la mairie et une taverne . La source, elle, ne jaillit pas en son centre, mais au Fayet, une centaine de mètres en contrebas –à 5 km par la route–, sur les bords du Bonnant, au fond d’une vallée encaissée.
Les paysans du coin la connaissent bien. Leurs troupeaux viennent paître à cet endroit où l’herbe est toujours verte. Mais c’est un notaire, Maître Gontard, qui, en 1806, la fait analyser, achète le terrain et construit un premier bâtiment. “Les curistes se promènent par les sentiers jusqu’au bourg, mais ne peuvent loger qu’aux thermes, Gontard n’autorise pas d’autres hébergements”, précise Gabriel Grandjacques, historien et adjoint au patrimoine à Saint-Gervais. “C’est le seul hôtel sur la route de Chamonix, les épouses de Napoléon 1er, Joséphine, puis Marie-Louise, s’y arrêtent donc pour une nuit”. Et comme il n’existe pas, en ce temps-là, de meilleure publicité que les visites impériales, même brèves, les thermes acquièrent rapidement une certaine renommée, accueillant baigneurs et non-baigneurs.

Les thermes ©Service Culture St Gervais

TOUJOURS PLUS EAU

Un médecin belge, le Dr de Mey, rachète l’ensemble en 1838. Il le rénove, l’agrandit et obtient de la commune de pouvoir utiliser la cinquantaine d’hectares adjacents pour en faire le parc thermal. L’établissement prospère. Mais l’homme est très pieux, il fait d’ailleurs bâtir sur le site une énorme chapelle, et, loin de l’ambiance mondaine des stations thermales de l’époque, impose aux curistes un règlement strict, quasi monastique, avec de vraies ambitions thérapeutiques. Cette approche plus médicale des cures, ainsi que le développement de l’alpinisme –en 1855, les Anglais Hudson et Kennedy ouvrent «la voie royale», seconde voie d’accès au Mont- Blanc, au départ de Saint-Gervais– participent à propager l’activité touristique sur le plateau de Saint-Gervais (lieu-dit la Forêt), qui devient un nouveau lieu de séjour, plus proche du bourg*. Il s’y ouvre deux hôtels, dont le monumental Mont-Joly, doyen de la station, construit entre 1860 et 1911 par 3 architectes différents, qui mélange les styles d’influences sarde, éclectique et Art Nouveau.

Les thermes, avant et après la catastrophe, fin 19e siècle.

DES EAUX ET DES BAS

Mais à l’aube du XXe siècle, alors que les thermes, repris par la Compagnie de Vichy, sont devenus une structure médicale de premier ordre, une tragédie frappe le fond de vallée. Dans la nuit du 11 au 12 juillet 1892, en pleine saison thermale, une poche d’eau, accumulée sous le glacier de Tête Rousse, se rompt, libérant des centaines de milliers de m3 de boue, de glace et de roches. Ce torrent rase le hameau de Bionnay, ravage une partie de celui du Fayet et détruit presque entièrement l’établissement, où l’on dénombre plus de 150 victimes.
Ce pourrait être la fin de l’aventure thermale de Saint-Gervais. “Mais en France”, comme le souligne le géographe Philippe Duhamel*, “la surenchère sur les eaux thermales est à son zénith et la crise agricole sévit. On se mobilise : hôteliers, guides, voituriers, conseil municipal en tête, le tourisme représente alors la ressource économique principale. Un nouvel établissement thermal et le Grand Hôtel de Savoie sont construits en aval, à l’entrée du parc. Le train PLM arrive au Fayet (1898) et le projet d’un train à crémaillère pour la Forêt est avalisé. Le Tramway du Mont-Blanc sera construit, quant à lui, en 1906. La commune installe les adductions d’eau, l’éclairage électrique, un égout et même un réseau téléphonique (1894-1900). À ce coup d’accélérateur, se surajoute un phénomène nouveau : l’apparition de villas, sur le plateau, autour des hôtels. En une décennie, le lieu a muté du bourg rural à la petite ville. Cette dynamique se poursuit jusqu’à la guerre, à la veille de laquelle Saint-Gervais est devenue une grande station touristique avec 120 villas, 15 hôtels et 5 palaces.

EN BONS THERMES

Le traumatisme a cependant été profond. Dans les années 30, alors que d’autres stations savoyardes connaissent un bel essor, les bains de Saint-Gervais stagnent. La construction d’un casino et de gros investissements ne solutionnent pas un problème majeur : transportées sur 400m de tuyaux jusqu’au nouvel établissement, les eaux perdent une bonne partie de leurs propriétés. La commune rachète donc l’ensemble et reconstruit un bâtiment à l’emplacement initial, qui a été sécurisé. Mais la fréquentation n’est plus la même, la clientèle de luxe a dis- paru, la crise a rendu difficile la gestion des grands hébergements touristiques, auxquels on préfère les chalets… La plupart des palaces ferment pour être transformés en appartements (comme le Grand Hôtel de Savoie, le Splendid-Royal ou le Mont-Joly).
Après plusieurs changements de mains, les bains font aujourd’hui partie du groupe L’Oréal. Le thermalisme est redevenu une affaire privée, mais son empreinte sur la ville est encore bien visible. “Le centre actuel a été façonné par les grands hôtels et les villas de cette époque”, résume Gabriel Grandjacques. “Et on essaie toujours de faciliter la circulation entre le Bourg et le Fayet, avec, notamment, un projet d’ascenseur valléen, qui relierait les deux.” Il permettrait également des échanges plus fluides avec le Parc Thermal, où se trouvent maintenant, en plus des thermes, le Centre Sportif Intercommunal, le parc aventures, une via ferrata, un rocher d’escalade, des terrains de tennis et de pétanque… Avec l’objectif de lui redonner un rôle central dans la vie de la commune, d’en faire «la salle de jeux de Saint-Gervais».

Avec l’aide de Gabriel Grandjacques, historien, adjoint au patrimoine et à la culture à Saint-Gervais

*Les Grands Hôtels, Témoins de l’Histoire du Tourisme, Le Splendid et Royal Hôtel à Saint-Gervais-les-Bains (Haute-Savoie) – Mireille Bruston, Philippe Duhamel – Mappemonde 59 -2000

Mélanie Marullaz

Mélanie Marullaz

Journaliste SURNOM: Poulette. PERSONNAGE DE FICTION: Elastigirl. OBJET FETICHE: mon oreiller. ADAGE: à chaque Barba-problème, il y a une Barba-solution. (philosophie Barbapapienne) JE GARDE: mes épaules. JE JETTE: mes grosses cuisses de skieuse. DANS 20 ANS? la tête de mon père sur le corps de ma mère. presse@activmag.fr

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