heureux comme un pap’ !
Nœud de pêcheur ou nœud en 8, pour Jonathan Pathinather, fils de marin, la relève aurait pu être toute tracée. Mais quand son destin bascule, il jette l’ancre et change de cap. Complètement accro à la mode, l’annécien se lance à 28 ans dans la création d’accessoires, juste pour les hommes. Nœud papillon en tête de liste, ça envoie du bois !

Certains ont le gène de la création dans le sang, styliste au berceau, le choix ne se pose pas. Il en va différemment pour Jonathan. Son histoire lui aura donné un peu de fil à retordre, quelques nœuds à dénouer avant de s’en créer de nouveaux… mais des beaux.
Né en région parisienne, d’origine sri lankaise, il mène une vie paisible jusqu’au décès de son père, à l’âge de 9 ans. Besoin de changement, entouré de sa mère et de ses sœurs, ils s’installent à Carcassonne: “Je me suis retrouvé dans un foyer exclusivement féminin, il a fallu apprendre à devenir un homme. C’est de grandir dans ce cocon qui m’a sensibilisé à la mode, mes sœurs ont ça dans le sang tout comme mon père l’avait. Il était amoureux de la France et aimait son élégance. Il était toujours beau et très bien habillé.” Jonathan ne le sait pas encore, mais tout part de là.
REBIRTH…
Qu’il est parfois difficile de pousser sans repère masculin… Après s’être retranché dans un mutisme adolescent, le jeune homme prend son mal à bras-le-corps. “Mon mal-être, créait une certaine distance et m’isolait des autres. A partir de ce moment-là, soit on prend le parti de rester confiné dans sa bulle, soit on choisit celui de grandir. J’étais un peu fermé d’esprit, j’avais besoin de rencontrer des gens différents.”
A 22 ans, il part illico en Angleterre où vit sa grand-mère maternelle, parfaire la langue et sa curiosité ! Plus question de perdre une miette de son temps, la vie reprend le dessus !
Mais il ne tient pas en place. Il voyage un peu partout, travaille un temps à Paris, se lasse, retourne en province, puis Londres, encore. Jonathan baroude et se cherche: “C’était une période très instable, mais surtout cruciale. Je me suis occupé de ma grand-mère, j’avais besoin de l’interroger instable, mais surtout cruciale. Je me suis occupé de ma grand-mère, j’avais besoin de l’interroger sur mon père, de comprendre le passé, j’avais besoin de cette proximité”, reconnaît-il avec pudeur. A partir de là, en paix avec son histoire, la donne va changer.
TÊTE DE NŒUD…
A L’occasion du mariage de sa sœur, il atterrit à Annecy, s’y installe et décroche un poste dans une entreprise suisse d’e-commerce international, où il rédige les conditions générales de vente des sociétés : “Au bout d’un moment, devant son ordinateur, on se demande à quoi on sert, qu’est-ce qu’on fait de sa vie ? J’ai compris que ce boulot ne m’apporterait jamais rien et c’est de là que l’idée de créer a germé, j’avais 26 ans.” 2014, motivé comme jamais, il démissionne. Il veut créer c’est sûr.
De la couture ? Des chemises ? Pas vraiment… Alors quoi d’autres ? « Je ne suis pas du tout bricoleur. Dans mon yoyo professionnel, il n’y a jamais rien eu de manuel. Pour autant, j’avais une idée en tête, juste pour les hommes et dans la mode. Beaucoup de choses sont faites pour les femmes, mais les gars aussi sont coquets, enclins à prendre soin d’eux, il fallait surfer sur cette vague.”
Et c’est un concours de circonstances qui va éclairer sa lanterne. Invité à un mariage – décidément… -, il remarque la rengaine des nœuds papillons et se dit pourquoi pas. Il décide de monter son entreprise, coule les fondations, bâtit la structure et s’attaque au gros œuvre : la création !
Communication, couture ou web, tout y passe. Quitte à se faire des nœuds au cerveau, Jonathan se forme sur tout, mais hors de question de déléguer. “Ce ne sont que des nœuds pap’, mais c’est ma façon de me prouver à moi-même que j’arrive à construire, à me construire, enfin…”
SCIONS, SCIONS, SCIONS DU BOIS…
En 2016, fin prêt, ses nœuds pap’ JUSTE pour les hommes voient le jour et sa marque est déposée. Entre élégance et persévérance «Because The Men» is in the air !
Comme il le reconnaît lui-même avec humour, son premier prototype est une pièce de musée. “A l’époque, je ne savais pas que c’était des ratés, aujourd’hui je n’ai aucun doute là-dessus !”
Nœuds traditionnels ou à nouer, il s’amuse, mais ne tient toujours pas le bon filon. En 2017, inspiré par un créateur milanais, il lui prend l’envie de donner un côté streetwear à ses créations, de casser un peu l’élégance. Le nœud pap’ en bois pyrogravé est dans les starting-blocks ! Quelques tutos plus loin, handmade toujours en ligne de mire, il est soutenu dans sa démarche par Nathan Grout, patron de Wood Stock Création à Meythet, qui lui propose son aide et signe les débuts d’une belle collaboration.
Aujourd’hui, à tout juste 30 ans, Jonathan laisse exploser sa créativité. Dark Vador, gribouillis ou petites fleurs, chaque nœud pap’ raconte un petit bout d’histoire sur mesure ou pas. Déclinable à l’infini, en noyer ou en acacia, il ne manque vraiment pas de charme ! Croix de bois…
+ d’infos :
becausethemen.com
Photos : Andy Viollet