chouchou de chef : Niels Rodin

2 Fév 2021

Pour l’amour du zeste

Les agrumes ? Niels Rodin, en connaît un quartier, et c’est peu dire ! Depuis sa campagne suisse, il nous emmène en voyage à la découverte du citron caviar, oranges amères et autres bombes vitaminées du monde entier… Prêt pour une croisière sur le Niels ? Pas un zeste, on vous raconte.

Niels Rodin ©Jeanne Martel

« Niels est un besogneux, un intellectuel, quasi un historien de l’agrume ! Il a su donner un sens à sa vie par passion, compris qu’il ne faut pas faire pour faire, mais faire pour être”, explique Laurent Petit, chef 3 étoiles du Clos des sens à Annecy-le-Vieux. Et quand on sait d’où il est parti, ça fait écho : “J’étais banquier, j’avais une trentaine d’années et tous les ans à Noël, avec les copains, c’était cravates ou boutons de manchettes. A la longue, c’était ennuyeux. Une année, j’ai eu envie de leur offrir du limoncello maison. Je n’y connaissais rien aux agrumes, alors je me suis renseigné.” Et comme le citron, c’est rengaine, youhouuu, voilà le yuzu. “J’ai eu un coup de cœur pour cet agrume japonais, encore peu connu à l’époque. Du cédrat à la main de buddha, je suis tombé dans un monde incroyable avec bien plus que les 6 agrumes !” Il part alors en quête du graal : “j’ai fait des pieds et des mains pour en dénicher. Dans une boutique japonaise de Genève, j’ai demandé à la patronne si elle pouvait m’en trouver. Elle est revenue quelques mois plus tard d’un voyage au Japon avec des yuzus dans sa valise, c’était pas très légal, mais j’ai pu les déguster et faire un limoncello avec. Et tout a démarré.

Citron rose ©Sara Thom Studio
Citron caviar ©Sara Thom Studio

LE ZESTE DE TROP

Vie de banquier d’un côté, nouvelle passion de l’autre, il n’a qu’une obsession, trouver des fruits. Mais la qualité n’est pas au rendez-vous, et si ça ne lui fait pas pousser la peau d’orange, on n’est pas loin. “Il y avait des problèmes de transports, ou ils n’étaient pas à parfaite maturité comme je voulais. Alors j’ai décidé de les cultiver moi-même !” Ben voyons Niels… Fastoche, non ? Il achète son premier arbuste et squatte son balcon pour l’occasion. “J’ai pris un très joli citronnier, mais aucun mérite, les fruits étaient déjà dessus. Arrivé l’automne, je le rentre à côté de la cheminée pour qu’il ait bien chaud. C’était une catastrophe !!! Pauvre plante : paix à son âme !” C’était pas gagné !

UN PEU DE PIQUANT

Niels arpente les forums, récolte des infos, il veut des fruits du monde entier et s’y tient. Semis de pépins, graines et greffes sont au rendez-vous, le pep aussi ! “Une petite collection d’agrumes est née et je suis allé voir Michel Baches, pionnier de l’agrumiculture pour en récupérer. Je partais avec des listes longues comme le bras et je rentrais avec 3 branches, parce qu’il ne voulait pas me les donner tout de suite. Et il avait bien raison ! Des gens qui produisent des agrumes, il y en a pas mal, mais ceux qui cherchent la particularité, une poignée.” Et si c’est pour faire de l’orange Navel, autant se faire la belle !

DANS LE JUS

Alors, le temps, il l’a pris pour proposer des agrumes venus de partout. En 2013, il choisit de bosser avec la bistronomie et l’exception des grands chefs. Un joli coup de poker ! Et même s’il faut présenter un max pour peu de succès, il préfère l’aventure acidulée, à l’écorce viciée. “Le moment parfait de la récolte, c’est quand le fruit vert commence à mûrir. On dit qu’il est vert tournant ! Mais comme le marché ne veut que des produits colorés, ça pose problème ! Ceux qu’on trouve en grande distribution ont été récoltés trop tôt à cause du transport, mis en chambres froides avec gaz éthylène pour le déverdissage, leur donner des couleurs, quoi. Ils sont ensuite cirés pour leur éviter de transpirer. Entre la récolte et la conso, il peut se passer entre 6 et 8 semaines. Ça donne des fruits pas terribles et des arômes sous-développés, mais qui vont se conserver plus longtemps. Alors qu’un agrume récolté chez moi, va tenir 10 jours max. Et en même temps, si tout le monde en voulait, je serais bien embêté !

©Sara Thom Studio

PUR JUS

Il faut dire que c’est du boulot ! Niels a couru après les serres d’abord pour l’hivernage, puis pour le développement de son activité, parce que c’est joli, mais ça pousse ! Et s’il propose des variétés olé olé, histoire de taquiner les chefs, c’est en 2015, que Laurent Petit débarque dans sa plantation. “On a fait le tour de la serre et une connexion s’est créée. Je lui faisais goûter un fruit, une feuille, on était tous les deux sur la même planète à discuter, décrire le produit, le goût, comment le travailler et c’était hallucinant ! Un chef étoilé qui m’écoute, moi l’amateur, c’était exceptionnel ! Il m’a fait découvrir son univers. C’était un pur échange, ça m’a marqué et depuis est née une très belle amitié. Je goûte à chaque fois qu’il utilise un de mes produits, c’est une reconnaissance ultime qui m’a convaincu.” Et c’est suite à la crise financière de 2017 que Niels, encore banquier et le citron pressé, décide de tout lâcher pour ses cultures, après 10 ans de mijotage bien emmené.

DÉ-GREFFÉ

Il s’associe, s’agrandît encore et fait de la greffe son joujou préféré. Mais c’est long, 4-5 ans pour récolter et convaincre les autorités phytosanitaires : ce n’est pas du tout cuit. Alors il développe en priorité ses agrumes d’ailleurs, quand ils ne lui font pas faux bon ! “J’avais lu pas mal de trucs sur un fruit croisé entre un yuzu et une mandarine. J’ai eu la plante, je l’ai cultivée, ça a mis 3 ans. Elle ne m’a fait qu’un fruit que je cachais avec les feuilles. Au moment de la maturité, je le ramasse, rentre à la maison, mets le chat dehors, débranche le tèl et sors l’appareil photo, la totale ! Je goûte et c’est le néant ! Toute cette énergie pour… ça !” Question de terroir ! Alors oust !

Main de buddha ©Sara Thom Studio

RÉCOLTER LES FRUITS

Et en dehors de ces plantes qui ratent ou poussent de façon sporadique, rebondir, il sait faire. Après avoir failli tout perdre avec la Covid, il continue ses greffes bien sûr, mais propose surtout, plus de 150 variétés de fruits azimutés. De l’original d’un Kaiser citron au combawa, plus répandus, il suffit de frotter l’écorce pour kiffer. Bruts, natures et d’une couleur d’exception, ses fruits mixent patience et sensibilité d’artiste. Et cette précision du zeste…

Citrus isole di Brigasso ©Corinne Spoerer

Le mot du chef : Laurent Petit

“Ce que j’aime surtout, chez Niel, c’est sa philosophie. L’idée que ce gars est un véritable historien de l’agrume. A chaque fois qu’il vient, on apprend quelque chose. Il est parti chercher la matière, il nous emmène ailleurs et ça c’est chouette. Je ne pourrais pas donner un nom d’agrume en particulier, simplement qu’il y a la lecture folle d’un produit qui vient de l’autre bout du monde et que depuis ses balbutiements, il a été capable de faire une synthèse de toute une civilisation qui, peut-être un jour, sera démocratisée grâce à lui. Avec Niels, le débat est de suite élevé et cette intelligence, il l’a jusqu’au bout des doigts. Il m’a fait découvrir que dans un agrume il y a le zeste, le ziste et la chair et ça colle totalement à ma philosophie, la façon que j’ai d’écouter un produit, de le scanner, de l’exploiter de A à Z. J’adore ces approches surprise et j’aime être cueilli, comme j’aime que les gens se laissent cueillir chez moi.”

Baba aux agrumes et safran par Laurent Petit

+ d’infos : http://nielsrodin.com

©Philip Frowein

Magali Buy

Magali Buy

SURNOM : Mag... (d'ailleurs activ'mag c'est pour moi, non ?) PERSONNAGE DE FICTION : Xéna la guerrière OBJET FETICHE : mon piano, il m’écoute, me répond et me comprend mieux que personne. ADAGE : « si tout le monde sait où tu vas, tu n’arriveras jamais à ta destination. Laisse-les croire que tu dors.» JE GARDE : mon mauvais caractère, ma langue bien pendue, mon cœur ouvert et mes yeux verts JE JETTE : mon insécurité, ma cellulite et ma paranoïa... DANS 20 ANS : la même en pire, si c'est possible !

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