VILLES THERMALES : AU FIL DE L’EAU

15 Fév 2022

DANS LE MÊME BAIN !

Aix, Evian, Saint-Gervais, Thonon, Brides, Divonne… «-les-Bains». Ces deux petits mots, synonymes d’eau évidemment, relient ces villes entre elles et, comme le ferait un nom de famille, leur donnent des traits de caractères similaires et des airs de ressemblance, témoins de bouts d’histoire communs.

Au départ, il y a forcément une source, chaude ou froide, bonne à consommer ou pour barboter. Mais jusqu’au XVIIIe siècle, pas d’analyses, les propriétés de l’eau ne sont connues que de manière très empirique. Les buveurs et baigneurs sont principalement des locaux, qui, le soir, rentrent chez eux, chez leurs parents ou amis. Quelques rares lieux privilégiés permettent l’hébergement de « personnes de qualité » car ils se trouvent à proximité d’un couvent ou d’un château hospitalier -c’est le cas de l’Hôtel de M. de Seyssel à Aix ou du Château de Blonay à Evian1– mais l’ensemble reste confidentiel et peu structuré. C’est à Bath, en Angleterre, qu’émerge l’idée de faire de ces points d’eau des destinations mondaines, des endroits où se croisent artistes, intellectuels, membres de la Cour… Au milieu du XVIIIe siècle, la ville du Somerset attire plus de 2000 curistes chaque été et lance un modèle de villégiature avec urbanisme et programme architectural dédiés1. Dans la foulée, le thermalisme se développe en France et en notamment en Savoie, sous l’impulsion de l’administration sarde. De nombreuses sources sont reconnues, analysées. En fonction de leurs vertus se développent des stations, sur l’exemple de l’élégante Britannique.

RIEN QUE DE L’EAU ?

La marche participant à la réussite du traitement, les premiers aménagements découlant de cette orientation -en dehors des établissements thermaux- portent sur la création de promenades, comme celle du Gigot à Aix-les-Bains. Même si la campagne est souvent proche, le Parc Thermal devient ensuite rapidement l’un des quatre éléments clés de ce nouveau modèle urbain, avec les Thermes, le Grand Hôtel et le Casino, qu’on appelle d’abord le Cercle. Car si les curistes ne passent pas leurs journées à boire de l’eau ou à se promener, leurs accompagnants encore moins. Il faut les occuper. Jusqu’à la Deuxième Guerre Mondiale, l’attractivité d’une ville thermale se mesure donc à la qualité de ses eaux et au foisonnement des activités qu’elle propose. “C’est ainsi que, pendant les Années folles, cette clientèle à haut revenu fréquente les palaces, les opéras et les music-halls, joue au casino, danse le jazz ou le tango…” re-situe le rapporteur d’une étude sur la diversification des activités thermales2. “On considère que dans ces villes d’eaux, la part de véritables curistes est inférieure à 50% de la clientèle ! Mais cela ne concerne que quelques stations, comme Aix, Brides ou Evian ; d’autres, plus petites, plus modestes aussi, accueillent surtout des patients, pour qui le soin passe avant le loisir.

ARCHI STYLÉES

Casinos flamboyants, villas somptueuses, hôtels luxueux, “quand on pense thermalisme, on pense surtout à une architecture fin XIXe, début XXe”, résume Florence Fombonne-Rouvier, directrice du CAUE73, “qu’on retrouve aussi sur la Côte Basque, en Bretagne ou dans les autres villes d’eaux.“ Et pour cause. “C’est la grande époque de l’École des Beaux-arts”, confirme Arnaud Dutheil, du CAUE74, “où dessiner l’hôtel d’une station thermale est un exercice de style pour les étudiants en architecture. C’est pour ça qu’on retrouve un peu la même typologie de bâtiments, qui n’a rien de local, que ce soit à St-Gervais, au Touquet ou dans le Massif Central. D’autant qu’il y a toute une campagne de constructions qui se fait au moment de l’émergence d’un style, l’Art Nouveau.” Ferronneries, balcons et marquises à Aix-les-Bains, Buvette Cachat à Evian, Hôtel Chicago à Divonne… Ce marqueur de la Belle Epoque est effectivement bien visible, ainsi qu’une autre tendance qui se plait à mélanger les références historiques antérieures : l’éclectisme, qu’on retrouve à la Villa du Châtelet à Evian, et à La Roche du Roi ou l’Hôtel Bernascon à Aix. “Et à l’intérieur des thermes, il faut à la fois le côté hygiéniste, avec de grandes baies qui laissent entrer la lumière, des pièces larges, pas de recoins ; et des espaces mondains pour que les gens se rencontrent, avec des tableaux, des sculptures”.

Thermes Pelligrini Aix-les-Bains (©Archives municipales d’Aix-les-Bains)

À LONGS THERMES ?

Ce faste imprègne donc les stations thermales savoyardes et les définit jusqu’à la moitié du XXe siècle. Mais après la Seconde Guerre Mondiale, la période de mutation sociale et économique ouvre le thermalisme à une fréquentation plus populaire, avec la reconnaissance des cures par la Sécurité sociale en 1947. Ce tournant sauve une grande partie des stations thermales françaises de la fermeture -les bains de la prestigieuse Bath, eux, fermeront à la fin des années 70-. Mais il s’en suit un changement radical dans la fréquentation. Les curistes, aux revenus beaucoup plus modestes, viennent désormais uniquement pour le soin, et non pour les loisirs appréciés auparavant par la clientèle huppée. On détruit les villas. La plupart des palaces, vétustes, trop chers à l’entretien, ne rouvrent pas et sont convertis en appartements.
Mais la grande époque du thermalisme a profondément marqué les villes d’eaux savoyardes, qui en ont gardé, pour la plupart, les bâtiments emblématiques, voire l’âme. “Le thermalisme a eu une telle influence sur le développement d’Aix, par exemple, qu’il a même amené la ville, jusqu’au XXe siècle, à tourner le dos au lac, à se ramasser sur le secteur des sources, c’est un élément fort et fédérateur”, rappelle Florence Bombonne-Rouvier. “Il est plus anecdotique à Challes, mais à La Léchère, il a permis de contre-carrer une image noire, charbonneuse, et à Brides et Salins, si l’activité a été un peu mise sous coupe au profit du ski, c’est en train de changer aujourd’hui, avec la volonté de fonctionner sur quatre saisons”. Même si elle a coulé sous les ponts, l’eau thermale irrigue donc encore abondamment les stations dont elle a jailli.

ANNECY-LES-BAINS ?

Il aurait pu y avoir une 4e destination thermale haut-savoyarde…” tease Arnaud Dutheil, directeur du CAUE74. “Le rattachement de la Savoie à la France a boosté les stations locales, et une ville située au bord d’un lac, lieu de villégiature romantique par excellence, avec un casino et un théâtre, qui, -consécration!- fait l’objet d’une visite du couple napoléonien, puis lance la construction d’un palace, c’était un signal…” Au tournant du XXe siècle, Annecy a effectivement tous les atouts en mains, sauf peut-être une source exploitable à des fins thermales. Le projet est donc… tombé à l’eau -oui, c’est facile.

1. Les villégiatures du XVIe au XXIe siècles – Marc Boyer – EMS Management et Société – Janvier 2008
2. La diversification des activités des stations thermales – Conseil National du Tourisme (2011)

Photo : ©Archives départementales de l’Ain, 5 Fi 143-139, Ancien établissement des Bains

Mélanie Marullaz

Mélanie Marullaz

Journaliste SURNOM: Poulette. PERSONNAGE DE FICTION: Elastigirl. OBJET FETICHE: mon oreiller. ADAGE: à chaque Barba-problème, il y a une Barba-solution. (philosophie Barbapapienne) JE GARDE: mes épaules. JE JETTE: mes grosses cuisses de skieuse. DANS 20 ANS? la tête de mon père sur le corps de ma mère. presse@activmag.fr

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