vins du beaujolais- domaine jean-claude lapalu –

6 Oct 2019

hôte de brouilly

DIRE QU’IL EST PROFONDÉMENT ANCRÉ DANS SON TERROIR EST UN EUPHÉMISME. DIRE QU’IL EST IMPRESSIONNANT, AUSSI. UNE CARRURE DE LÉGIONNAIRE, UNE VOIX QUI RÉSONNE DES ANNÉES BIEN VÉCUES ET UN REGARD ACIER, JEAN-CLAUDE LAPALU SE POSE LÀ, DROIT, SOLIDE. MAIS IL SUFFIT DE LE LAISSER DÉCANTER, PAS TRÈS LONGTEMPS, POUR QU’IL PARTAGE SA PASSION ET SON RIRE FRANC.

J’ai grandi dans cette maison que vous voyez là- bas, puis mes parents ont déménagé ici, de l’autre côté de la route, moi j’ai bougé là, et maintenant j’habite dans la petite rue juste en face.” Depuis ce qu’il appelle «le vaisseau amiral», cette parcelle qui surplombe son chai, Jean-Claude Lapalu fait le tour des différentes étapes de sa vie, concentrées dans un rayon de 200 mètres, dans le hameau de Fourque à St Etienne-la-Varenne. Il a poussé, comme ses vignes, sur cette terre dont il tire aujourd’hui la plus belle expression.
 

Elle n’a pourtant pas été immédiate cette passion. Quand, dans les années 80, il entre en vignes, c’est un choix «alimentaire» pour lui qui est devenu paysan parce qu’il n’était pas scolaire, et plutôt insubordonné. Il a 20 ans et reprend le métayage de son père, qui l’avait lui-même repris du sien. Dans ce système d’exploitation, la récolte est partagée à 50/50 entre le propriétaire et le locataire. Le premier finance la cuverie, le pressoir, la plupart des approvisionnements en engrais et produits, le second apporte son travail et le matériel de culture. Chacun doit assumer la commercialisation de sa propre récolte. Tombé en désuétude dans la plupart des vignobles français, il a encore cours en Beaujolais, et “il a permis à plein de vignerons de s’installer”, explique-t’il. A lui, la vente de son vin en coopérative donne la possibilité d’acheter progressivement quelques parcelles, puis de prendre un second métayage et de commencer, enfin, en 1996, à faire ses propres vinifications. “Je me suis rendu compte que ce n’était pas ce qu’on nous avait enseigné: on ne nous apprend pas à monter une charrue, on ne nous dit pas que le vin peut se faire tout seul, mais on nous parle molécules, produits phytosanitaires, tout ça… Et dès le début, même si je ne savais pas vraiment ce que je voulais, je savais exactement ce que je ne voulais pas !”

BOIS-SANS-SOUFRE

Ses intentions, il les affine au gré des rencontres. La première ne se fait ni dans le Beaujolais, ni avec un vigneron. C’est François Blanc-Gonnet, fromager et caviste de la laiterie Bayard à Grenoble : “un montagnard très précis, qui me parle du vin comme jamais et qui achète une partie de ma première récolte. Il la goûte à la cuve et me dit : «tu me la mets en bouteille comme ça, sans filtration, sans soufre. Et je vais te prendre des nouveaux aussi, mais je ne voudrais pas que tu les chaptalises.» Je ne savais même pas qu’on pouvait faire du vin sans sucre…” Il lui commande 6000 bouteilles, elles circulent et c’est le début de tout : Lapalu se lance dans la fabrication de vins sans artifices ni cosmétiques, des Beaujolais Villages, des Brouilly, et des Côtes de Brouilly droits et solides, comme lui.
“En faisant des vins comme ça, on est obligé de commercer soi-même, car ils n’ont pas leur place chez les grands négociants.” Ils sont, par contre, dans le collimateur d’agents, traqueurs de «vins d’avenir». C’est par le biais du sien que Jean-Claude Lapalu entre en relation avec des passionnés, originaires d’autres régions viticoles, mais travaillant comme lui, et avec lesquels il va échanger, apprendre : “nous voulions tous comprendre comment faire des vins naturellement. Et il y avait toujours un mot, une phrase dans la soirée, même bien arrosée, qui aidait à progresser. Surtout sur la vinif, l’élevage, le fait de ne pas utiliser de sulfites ou a minima”. Parmi eux, le Corse Yves Canarelli, le domaine Viret et ses Côtes-du- Rhône Villages ou «Bellu», le Haut-savoyard Dominique Belluard.

LAPALU, NOUS VOILÀ !

A la fin des années 90, les lieux où sont distribués les vins natures ne sont pas si nombreux, les bouteilles de Jean-Claude finissent donc par côtoyer celles de ses voisins de Morgon, les Marcel Lapierre, Jean Foillard, Yvon Métras… “Ils se sont dit : «il y a un gars qui fait dans la même philosophie que nous de l’autre côté de la colline», et ils sont venus me voir : «Lapalu, tu viens avec nous !»”. Le voilà adoubé par les «sans-soufre» en Beaujolais.
Une dernière rencontre décisive ? Bruno Quenioux, l’acheteur de Lafayette Gourmet à Paris, qui lui fait confiance et l’intègre à la cave de grand magasin, référence pour bon nombre de sommeliers : “il faut vendre du vin à Paris pour en vendre à New York et Tokyo, et il faut vendre à New York et Tokyo pour vendre à Lyon”, sourit Jean-Claude. C’est avec son Brouilly Cuvée des Fous, en 2000, qu’il séduit leur palais et gagne ses lettres de noblesse : “une année magique ! En 2001, le vin était plus dilué, mais quand je m’excusais auprès de mes clients de ne pas pouvoir leur présenter quelque chose d’aussi bien, ils me répondaient : «Dis, Lapalu, si tu nous présentes le même vin chaque année, on ne va pas rester co- pains !» Et c’est le problème avec l’œnologie moderne, elle a envie de tout maîtriser, les levures, le soufre, pour une analyse parfaite, mais avec ça, on s’ennuie !”

DES FÛTS, DÉ… FIS

Lapalu, lui, ne s’ennuie pas. Cueillette manuelle, tri sur pied, presse très lente dans l’imposant pressoir à écureuil du 19e qui fait sa fierté… Et il se fixe régulièrement de nouveaux défis. En 2006, il rachète les terres qu’il louait depuis 10 ans, sur lesquelles il construit, l’année suivante, son chai. Il est enfin chez lui. Même si, pour cette 1re cuvée dans ses murs : “on a bataillé comme pas possible ! Un chai, il faut qu’il soit habité par une population levurienne, qui s’accroche dans les cuves de béton, dans les charpentes, et qui là, n’existait pas. C’est comme pour les jarres –un autre défi : sa cuvée Alma Mater, égrappée, qui macère en amphore pendant 7 mois et demi-, la fermentation commence en 48h dans celles qui ont déjà servi, elle met 4 jours à démarrer dans les nouvelles.”
Et en 2016, avec Bellu et l’Ardéchois Matthieu Barret, ils tentent un assemblage de Mondeuse, Syrah et Gamay, pour une cuvée «3 Lands» exceptionnelle. Etait-il bon ? “Un vin n’est jamais aussi bon que quand il a le goût du raisin !” Lui ressemblait-il ? Lapalu répond par une dernière anecdote : “Un soir, un ami vigneron a demandé : comment peut-on faire des vins aussi fins en étant aussi bourru ?” Il s’adressait alors à Yvon Métras, mais il semblerait que Jean-Claude Lapalu connaisse la réponse…

+ d’infos : Jean-Claude Lapalu

St Etienne La Varenne – 69

 

Le Mot de THOMAS LORIVAL

Il est de cette ancienne génération que j’aime bien suivre, avec une vraie maîtrise dans les vinifications, des choses plus posées, une expérience qu’il met au service du vin. Son terroir est assez étonnant, avec ses vieilles vignes très en pente, ce qui est plutôt rare dans le coin. Son Eau Forte, en Vin de France, a un côté floral, délicat, charmeur. Mais sa Cuvée Croix des Rameaux en Brouilly, qui nécessite plus de compréhension, de temps pour l’apprivoiser, est l’une de celles qui m’ont beaucoup marqué. Sa concentration donne envie de voir son évolution dans le temps et offre une belle image du Beaujolais, qui fait oublier les vins jeunes sans potentiel de garde.

 

photos : Floartphotography

Mélanie Marullaz

Mélanie Marullaz

Journaliste SURNOM: Poulette. PERSONNAGE DE FICTION: Elastigirl. OBJET FETICHE: mon oreiller. ADAGE: à chaque Barba-problème, il y a une Barba-solution. (philosophie Barbapapienne) JE GARDE: mes épaules. JE JETTE: mes grosses cuisses de skieuse. DANS 20 ANS? la tête de mon père sur le corps de ma mère. presse@activmag.fr

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